Fiscalité des entreprises
De la taxe professionnelle à la contribution économique territoriale
Annoncée depuis quelques mois, la suppression de la taxe professionnelle est chose faite avec la loi de Finances pour 2010. En effet, celle-ci se trouve remplacée, dès le 1er janvier 2010, par la contribution économique territoriale (CET), composée de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).
La CFE est une cotisation établie sur la valeur locative des seuls biens passibles d’une taxe foncière. Ainsi, l’imposition tant contestée des équipements et biens mobiliers se trouve supprimée, ceux-ci se trouvant désormais exclus de la base d’imposition. Outre cette particularité, et sous réserve de quelques nuances, la CFE reprend l’essentiel des caractéristiques attachées à la taxe professionnelle.
La CVAE est quant à elle une cotisation assise sur la valeur ajoutée. Inspirée très largement de la cotisation minimale de taxe professionnelle, elle se trouve finalement à la charge des entreprises dont le chiffre d’affaires de la période d’imposition excède 152 500 euros. Ces entreprises devront calculer leur cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises en multipliant la valeur ajoutée produite par un taux unique de 1,5 %. Précisons que compte tenu des dégrèvements applicables, ce sont les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 50 millions d’euros qui supporteront réellement la CVAE au taux de 1,5%.
Enfin, et en parallèle à l’ancien plafonnement de la taxe professionnelle, un plafonnement de la CET est instauré dans des conditions relativement similaires, ce dernier venant s’imputer sur la CFE.
TVA : réforme des règles de territorialité des prestations de services
A compter du 1er janvier 2010, ce que l’on appelle communément le « Paquet TVA » se trouve définitivement adopté. Il s’agit de la transposition en droit interne de trois directives européennes.
Modifiant en profondeur les règles de territorialité des prestations de services, cette réforme essentielle conduit à établir une distinction entre les prestations réalisées entre assujettis et celles réalisées par un assujetti au profit d’un non assujetti.
Les premières – concernant les prestations réalisées entre assujettis – connaissent pour principe général de taxation le lieu d’établissement du preneur comme lieu de localisation de la prestation. En revanche, pour les secondes – celles réalisées par un assujetti au profit d’un non assujetti – le lieu de localisation de la prestation se trouve être celui de l’établissement du prestataire.
A ces principes généraux s’attache toute une série de dérogations qu’il convient de ne pas éluder. En effet, et parce que la TVA se veut avant tout un impôt sur la consommation, certaines prestations aisément localisables ont pour critère commun d’être taxées au lieu de leur consommation effective. Aussi, aux dérogations exclusivement applicables aux services rendus au profit des non-assujettis s’opposent des dérogations applicables quelle que soit la qualité du preneur…
De cette réforme, et en particulier des nouvelles règles applicables aux services rendus entre assujettis, découle une généralisation du mécanisme de l’auto-liquidation de la TVA. C’est ainsi que le prestataire agissant au profit d’un preneur assujetti établi dans un autre Etat membre ne sera plus tenu de s’identifier dans ce pays de taxation, comme il avait parfois à le faire jusque-là. Cela permettra encore d’éviter aux preneurs d’avoir à solliciter auprès de l’Etat du prestataire le remboursement de la TVA qui grevait ces prestations. La TVA sera ainsi en quelque sorte collectée et déduite par le preneur.
En revanche, dès lors qu’un prestataire réalisera une prestation auto-liquidée au profit d’un preneur assujetti établi dans un autre Etat membre, il sera alors tenu de répondre à une nouvelle obligation déclarative : la déclaration européenne des services.
Par exemple, un prestataire français assujetti réalise une prestation au profit d’un preneur allemand assujetti. Le preneur allemand va auto-liquider la TVA, et le prestataire français fera une déclaration européenne de services.
Enfin, la loi de Finances pour 2010 modernise la procédure de remboursement de la TVA aux assujettis non établis dans l’Etat membre au sein duquel est sollicité le remboursement. Il s’agit là d’une dématérialisation de la procédure.
Jusqu’alors, l’assujetti ayant supporté de la TVA dans un autre Etat membre devait adresser une demande au service compétent de cet Etat. Désormais, il déposera sa demande sur un portail électronique prévu à cet effet, demande que l’administration française se chargera de transmettre au service compétent de l’autre Etat membre.
Actualisation de la franchise de TVA
Dans la même proportion (+ 0,4 %) que la limite supérieure de la première tranche du barème d’imposition, certains seuils ont été revalorisés pour 2010.
Ainsi, les limites d’application de la franchise en base de TVA sont portées à 80 300 et 88 300 euros (limite majorée) pour les ventes de marchandises à emporter ou à consommer sur place et les prestations d’hébergement, et à 32 100 et 34 100 euros (limite majorée) pour les autres entreprises. Les limites spécifiques notamment prévues au profit des avocats, auteurs et artistes-interprètes sont elles aussi revalorisées dans la même proportion de 0,4%.
Actualisation des seuils des régimes d’imposition
A compter du 1er janvier 2010, les limites d’application du régime simplifié d’imposition, tant en matière de BIC que de TVA, sont portées à 766 000 Euros pour les ventes de marchandises à emporter ou à consommer sur place et les prestations d’hébergement, et à 231 000 euros pour les autres prestations de services.
Les montants de chiffres d’affaires au-delà desquels le régime simplifié de TVA prend immédiatement fin sont quant à eux portés à 843 000 euros pour les ventes de marchandises à emporter ou à consommer sur place et les prestations d’hébergement, et à 261 000 euros pour les autres prestations de services.
Les limites d’application du régime micro-BIC (qui permet notamment d’être exonéré de TVA et de payer l’impôt sur une base forfaitaire du chiffre d’affaires) sont portées à 80 300 euros pour les ventes de marchandises à emporter ou à consommer sur place et les prestations d’hébergement, et à 32 100 euros pour les autres prestations de services, tandis que la limite du régime micro-BNC est portée à 32 100 euros.
Le maintien des reports d’imposition des plus-values professionnelles
La loi de Finances pour 2010 introduit une possibilité de maintien des reports d’imposition des plus-values professionnelles dans des hypothèses où des opérations ultérieures censées y mettre fin bénéficient elles aussi d’un nouveau report ou sursis d’imposition.
C’est ainsi que désormais, les opérations placées sous un régime de report ou sursis d’imposition entraînent le maintien des reports d’imposition initiaux.
Exemple : un exploitant apporte son entreprise individuelle en société, en se plaçant sous le régime optionnel de l’article 151 octies, bénéficiant ainsi d’un report d’imposition. S’il apporte ensuite les titres reçus en rémunération de l’apport à une société en se plaçant sous un nouveau régime de report d’imposition, le report initial demeure.
Fiscalité des particuliers
Le nouveau barème de l’IR
Comme chaque année, le barème de l’IR se trouve réactualisé, tout comme les différents seuils et limites, de 0,4% pour 2010. Le nombre de tranches demeure quant à lui inchangé, puisqu’il est cette année encore de 5.
Fraction du revenu imposable (une part) | Taux |
N’excédant pas 5 875 € | 0 % |
De 5 875 € à 11 720 € | 5,5 % |
De 11 720 € à 26 030 € | 14 % |
De 26 030 € à 69 783 € | 30 % |
De 26 030 € à 69 783 € | 30 % |
La fiscalisation dès le premier euro des indemnités de départ volontaire à la retraite
Jusque-là, les indemnités de départ volontaire à la retraite ou en préretraite versées en dehors de tout plan de sauvegarde de l’emploi échappaient à l’impôt sur le revenu à hauteur des premiers 3 050 euros. A compter du 1er janvier 2010, cette exonération partielle prend fin et les indemnités se trouvent soumises en totalité à l’impôt sur le revenu.
Une imposition partielle des indemnités temporaires d’accident du travail
Désormais, les indemnités journalières de sécurité sociale versées en cas d’accident du travail seront fiscalisées. Toutefois, ceci ne sera effectif que pour 50% de leur montant. Il s’agit là en réalité de maintenir l’exonération pour la part de l’indemnité journalière attribuée en compensation du préjudice subi, tandis que devient imposable la part afférente au revenu de remplacement.
Une modification notable du crédit d’impôt habitation principale
Le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt versés à l’occasion de l’acquisition d’une résidence principale pour les acquéreurs de bâtiments à basse consommation d’énergie restera fixé à 40% des intérêts la première année, taux maintenu à 40 % les quatre années suivantes.
En revanche, et dans le cadre d’un « verdissement » de ce crédit d’impôt, les taux du crédit d’impôt dépendront des niveaux de performance énergétique du logement. Ils seront graduellement réduits pour les logements neufs ne répondant pas à ces critères de basse consommation d’énergie.
En effet, lorsque les logements acquis ou construits de 2010 à 2012 seront seulement conformes à la règlementation en vigueur, sans répondre aux conditions d’attribution du label BBC 2005 (label bâtiment basse consommation), le taux du crédit d’impôt sera ramené :
en 2010, à 30% pour la première année puis 15% les quatre années suivantes,
en 2011, à 25 % pour la première année puis 10% les quatre années suivantes,
en 2012, à 20% pour la première année puis 5% les quatre années suivantes.
A compter de 2013, les logements n’ouvriront pas droit au crédit d’impôt s’ils ne répondent pas aux conditions d’attribution du label BBC 2005.
Réduction d’impôt Scellier
Les logements acquis ou construits dans le cadre du dispositif Scellier bénéficient aujourd’hui d’une réduction d’impôt sur le revenu, maintenue jusqu’à fin 2010 au taux de 25 %.
A compter de 2011, les logements acquis ou construits qui répondront au label BBC 2005 (bâtiment basse consommation) continueront à bénéficier de cette réduction d’impôt au taux de 25 %.
En revanche, pour ceux qui ne répondront pas aux conditions d’attribution du label BBC 2005, ce taux de réduction d’impôt ne sera que de 15 % en 2011, et sera ramené à 10 % pour les logements acquis ou construits en 2012.
Du nouveau plafonnement global des niches fiscales
La loi de Finances pour 2009 instituait un mécanisme de plafonnement des niches fiscales applicables à l’impôt sur le revenu. Sans modifier de façon substantielle le fond de la mesure, la loi de Finances pour 2010 rend encore plus sévère le mécanisme.
A compter de l’imposition des revenus de 2010, le plafond global des niches fiscales s’exercera dans la limite d’un montant forfaitaire de 20 000 Euros, contre 25 000 Euros pour 2009, plus une fraction de 8%, contre 10% en 2009, du revenu imposable du foyer fiscal.
Ainsi, un foyer fiscal dont le revenu imposable est de 100 000 euros ne saurait bénéficier des niches fiscales au-delà de 28 000 euros (20 000 + 8% de 100 000 euros).
Bouclier fiscal
Concernant le bouclier fiscal, la loi de Finances modifie sensiblement les règles de prise en compte des dividendes et déficits. Rappelons que le bouclier fiscal a pour but de permettre aux contribuables d’obtenir la restitution de la fraction des impôts directs et des prélèvements sociaux excédant 50% de leurs revenus. Jusqu’alors, lorsqu’un contribuable optait pour l’imposition de ses dividendes au barème de l’impôt sur le revenu, seule une fraction de ces dividendes était prise en compte dans le calcul du bouclier fiscal.
Aussi, et à compter du bouclier 2011, tenant compte des revenus 2009, les revenus nets soumis à l’impôt sur le revenu seront majorés des abattements dont bénéficient les dividendes soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu, ainsi que des déficits et moins-values de cession de valeurs mobilières des années antérieures à l’année de référence du bouclier.
Cette suppression de l’abattement de 40 % se trouve toutefois atténué puisque la loi de Finances rectificative pour 2009 prévoit de retenir les dividendes pour une fraction de leur montant qui sera fixée à 70 % pour les dividendes perçus en 2009, à 80 % pour les dividendes perçus en 2010, et 90 % pour ceux perçus en 2011.
Fiscalité du patrimoine
Option prorogée pour le prélèvement libératoire
Les contribuables pourront opter jusqu’au 15 juin 2010 pour le prélèvement forfaitaire libératoire de 18% pour les dividendes perçus en 2009. L’option étant exercée postérieurement à l’encaissement des revenus, la déclaration de ces revenus et le versement du prélèvement au Trésor interviendront dans les quinze premiers jours suivants l’exercice de l’option.
Plus values sur valeurs mobilières et plus-values immobilières
Continuent d’être exonérées d’impôt sur le revenu les plus-values sur droits sociaux d’une société soumise à l’IS ayant son siège en France, et ce sous certaines conditions, lorsque la cession a lieu à l’intérieur du groupe familial. Dans un contexte d’harmonisation des régimes d’exonération, les frères et sœurs font désormais partie du groupe familial pour les plus-values réalisées à compter du 1er janvier 2009.
Par ailleurs, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 prévoit l’imposition aux prélèvements sociaux (12,1 % : CSG, CRDS…) des plus-values sur valeurs mobilières et droits sociaux dès le premier euro, tandis que l’exonération d’impôt sur le revenu demeure lorsque les cessions sont inférieures à un certain seuil, fixé pour 2010 à 25 830 euros.
Enfin, pour les cessions immobilières réalisées à compter du 1er janvier 2010, le seuil d’imposition de 15 000 euros est précisé. En effet, le législateur est venu ajouter qu’en cas de cession d’un bien détenu en indivision, il conviendrait d’apprécier ce seuil de 15 000 euros au regard de chaque quote-part indivise, sans qu’il soit nécessaire de connaître la valeur totale du bien. Par ailleurs, en cas de cession d’un bien dont le droit de propriété est démembré, l’on appréciera le seuil au regard de chaque quote-part indivise en pleine propriété.
Donations en franchise de droit : la prorogation de l’âge du donateur
Si l’âge limite pour effectuer un don à un enfant ou à un neveu en franchise de droit demeure fixé à 65 ans, celui-ci se trouve porté à 80 ans en cas de don à un petit-enfant, arrière-petit-enfant ou encore à un petit neveu.
Ainsi chaque grand-parent ou arrière-grand-parent pourra effectuer un don exonéré dans la limite de 31 395 euros à chacun de ses petits-enfants ou arrière-petits-enfants jusqu’à ses quatre-vingt ans.
Réduction d’impôt sur le revenu pour souscription au capital de PME
La loi de Finances pour 2010 proroge le dispositif de réduction d’impôt sur le revenu à raison des souscriptions en numéraire au capital des PME communautaires non cotées. Initialement applicable aux souscriptions réalisées jusqu’au 31 décembre 2010, la réduction d’impôt est prorogée aux souscriptions réalisées jusqu’au 31 décembre 2012.
ISF
Le seuil d’imposition de l’ISF restera fixé pour l’ISF 2010 à 790 000 euros.
Par ailleurs, la réduction d’ISF pour investissements dans les PME est par principe soumise à la conservation des titres reçus en contrepartie de la souscription pendant un délai de cinq ans. La loi de Finances introduit à compter du 1er janvier 2010 la possibilité pour le souscripteur, en cas de cession stipulée obligatoire par un pacte d’associés, de réinvestir dans un délai porté de six à douze mois en souscrivant des titres de sociétés éligibles.