Cadres dirigeants titulaires d’une délégation de pouvoirs : vous pouvez participer aux élections professionnelles.

Par Frédéric Chhum, Avocat et Martha Verner, Doctorante.

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Explorer : # Élections professionnelles # délégation de pouvoirs # cadres dirigeants # conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 septembre 2021 d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité de l’article L2314-18 du Code du travail, tel qu’interprété par la chambre sociale de la Cour de cassation, à l’alinéa 8 du Préambule de la Constitution de 1946.

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1) Dispositions contestées.

Selon L2314-18 du Code du travail :

« sont électeurs les salariés des deux sexes, âgés de seize ans révolus, travaillant depuis trois mois au moins dans l’entreprise et n’ayant fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relatives à leurs droits civiques ».

La chambre sociale de la Cour de cassation considère que cet article exclut les salariés qui :
- ont une délégation écrite d’autorité permettant de les assimiler au chef d’entreprise (délégation de pouvoirs expresse) ;
- représentent l’employeur devant les institutions représentatives du personnel (délégation de pouvoirs tacite).

Ces deux catégories de salariés, qui peuvent par ailleurs avoir la qualité de « cadre dirigeant », ne sont donc ni électeurs ni éligibles aux élections du CSE (Cass. soc., 31 mars 2021, n° 19-25.233, publié au bulletin).

2) Faits.

Au sein de l’un des établissements de la société Carrefour, des directeurs de magasin avaient été inscrits en qualité d’électeurs des représentants du personnel.

La fédération CGT avait saisi le tribunal d’instance (devenu tribunal judiciaire) afin d’obtenir l’annulation de ces élections.

En réponse, la SNEC CFE-CGC a formulé une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité de l’article L2314-8 du Code du travail à l’alinéa 8 du Préambule de 1946.

Conformément à ce texte, « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ».

3) Réponse du Conseil constitutionnel.

Par une décision du 19 novembre 2021 (CC, décision QPC n° 2021-947 du 19 novembre 2021), le Conseil constitutionnel répond que l’article L2314-8 du Code du travail, tel qu’interprété par la jurisprudence de la Cour de cassation, prive le salarié du droit de bénéficier d’une participation au CSE.

Le fait pour un salarié de représenter l’employeur ne suffit pas à justifier son exclusion des élections des représentants du personnel.

Par conséquent, le Conseil constitutionnel considère que l’article L2314-8 du Code du travail est contraire à l’alinéa 8 du Préambule de 1946.

L’abrogation de ce texte devra être effective au 31 octobre 2022 et concernera les cadres dirigeants (C. trav. art. L3111-2).

Pour rappel, l’article L3111-2 du Code du travail définit les cadres dirigeants comme les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps (1), qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome (2) et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement (3). La Cour de cassation précise quant à elle que la qualité de cadre dirigeant suppose la participation du salarié à la direction de l’entreprise (4).

D’ici le 31 octobre 2022, les salariés représentant l’employeur ne sont ni électeurs ni éligibles aux élections du CSE.

Sur le statut de cadre dirigeant et son interprétation par la chambre sociale de la Cour de cassation, lire nos articles :

- Droit des cadres dirigeants : panorama de jurisprudence 2016-2017.
- Cadres dirigeants - Panorama de jurisprudences 2018 et 2019.
- « Faux » cadres dirigeants : une DRH obtient la nullité de son statut de cadre dirigeant.
- Do you speak Cadre dirigeant ?
- Cadres dirigeants : 9 articles à lire ou à relire [1].

Source : Décision du Conseil constitutionnel du 19 novembre 2021 (décision QPC n° 2021-947 du 19 novembre 2021).

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\’ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
chhum chez chhum-avocats.com
www.chhum-avocats.fr
http://twitter.com/#!/fchhum

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