Cotisations sociales du gérant majoritaire d’une SARL et procédure collective.

Par Jonathan Durand et Donato Sirignano, Avocats.

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Explorer : # cotisations sociales # gérant majoritaire # procédure collective # liquidation judiciaire

Si la société peut prendre en charge les cotisations du gérant majoritaire d’une SARL, cela ne signifie pas pour autant qu’elle en est redevable.

En effet, en cas de procédure collective, le gérant majoritaire sera personnellement responsable de leur paiement.

-

En principe, le gérant majoritaire d’une SARL (ci-après le « Gérant ») n’engage pas ses derniers personnels lors d’une procédure collective sauf à ce qu’il soit condamné lors d’une action en responsabilité pour insuffisance d’actif en cas de faute de gestion.

Cependant, puisque le Gérant est le redevable de cotisations obligatoires (ex RSI - URSSAF, CIPAV, etc.), l’organisme collectant les cotisations peut (i) poursuivre celui-ci à titre personnel et (ii) n’aura pas à déclarer sa créance à la procédure collective.

C’est ce qu’a pu décider, pour l’ex RSI (URSSAF désormais), la Cour d’appel de Paris par arrêt du 29 Juin 2017 (n° RG 15/12350).

Et l’avis de la Cour de cassation, qui a qualifié ces dettes (RSI) de professionnelles = [1], n’a pas amélioré la situation du Gérant, bien au contraire.

En effet, cet avis n°16007 a été invoqué par un Gérant pour soutenir que

« les cotisations sociales qui lui sont réclamées constituent des dettes professionnelles dont le recouvrement ne peut être poursuivi à l’encontre du gérant majoritaire d’une SARL en liquidation judiciaire et qui devaient être déclarées par la caisse RSI au passif de la liquidation judiciaire de la société ».

Mais la Cour d’appel de Riom, par arrêt du 2 Juillet 2019 (RG 17/02809), lui a répondu que

« cet avis ne vise nullement l’hypothèse de la liquidation judiciaire d’une société et la prise en compte ou non au passif de cette société en liquidation, des cotisations sociales de son gérant ».

Cet avis a également été évoqué dans plusieurs arrêts avec un résultat identique, à savoir le refus d’intégrer ces cotisations dans le passif d’une société en liquidation [2].

Pire, non seulement l’avis n°16007 ne permet pas au Gérant d’échapper aux poursuites en cas de procédure collective mais il implique que

« la dette de cotisations et contributions destinées à assurer la couverture personnelle sociale d’un gérant majoritaire de SARL et dont le recouvrement est poursuivi par l’URSSAF est de nature professionnelle, de sorte qu’elle échappe en tant que telle à l’effacement consécutif à la procédure de rétablissement personnel dans le cadre du dispositif de traitement du surendettement des particuliers ».

Par conséquent, le Gérant n’est ni protégé dans le cadre de la procédure collective de la société, ni en cas de rétablissement personnel.

Il est évident que le contexte actuel appelle une réforme pour faire entrer ces cotisations sociales dans le passif de la société en procédure collective.

Pour l’instant, l’on relève une proposition de loi enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 avril 2019 (renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement) en vue de modifier l’article L622-17 du Code de commerce et d’y ajouter le texte suivant :

« V. - Les créances résultant des cotisations dont le gérant de l’entreprise est redevable sont des dettes professionnelles et doivent être portées à la connaissance de l’administrateur et, à défaut, du mandataire judiciaire ou, lorsque ces organes ont cessé leurs fonctions, du commissaire à l’exécution du plan ou du liquidateur, dans le délai d’un an à compter de la fin de la période d’observation ».

Mais cette proposition est à retravailler puisque :
- sont seulement visées les créances (donc cotisations en ce qui nous concerne) nées régulièrement après le jugement d’ouverture [3] - quid des dettes de cotisations antérieures au jugement ? ;
- il semblerait que l’hypothèse de l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire sans passage par une sauvegarde ou un redressement (procédure convertie en une autre) n’ait pas été envisagée (compte tenu de ce que seul l’article L622-17 du Code de commerce est cité, étant précisé que cet article s’applique également à la procédure de redressement par renvoi).

Par ailleurs, l’attention du Gérant est attirée sur la nécessité de prendre attache (rapidement) avec lesdits organismes pour, notamment, obtenir un échelonnement de la dette et une radiation en cas de liquidation (pour ne pas payer de cotisations supplémentaires).

Jonathan Durand, avocat
contact chez jonathandurandavocat.com

Donato Sirignano
Avocat européen aux barreaux de Paris et de Benevento (Italie)
sirignano.donato chez gmail.com

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Notes de l'article:

[1Avis n°16007 en date du 8 juillet 2016.

[2Notamment, Cour d’appel de Nîmes, arrêt du 21 Juin 2018, RG 17/04237 - Cour d’appel de Metz, arrêt du 23 septembre 2019, RG 18/01250.

[3Alinéa 1 de l’article L622-17 du Code de commerce.

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La déclaration de créances par LRE pour sécuriser les paiements.

La déclaration de créances par LRE pour sécuriser les paiements.

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170 lectures 1re Parution: 4.97  /5

En tant que juriste, avocat ou cabinet de recouvrement, vous pouvez être mandaté pour déposer une déclaration de créances lorsqu’un client fait face à des factures impayées. Cette procédure arrive lorsque le débiteur rencontre des difficultés financières et qu’il ne parvient plus à faire face à ses dettes. Il risque alors de se retrouver en difficulté financière, pouvant potentiellement conduire à une situation de cessation de paiements. L’ouverture d’une procédure collective est bien souvent l’étape suivante. Ce type de procédure vous empêche de vous retourner contre le débiteur. Dans cet article, retrouvez tous nos conseils pour permettre à vos clients de recouvrer rapidement leurs impayés. Nous verrons également comment la Lettre recommandée Electronique permet de sécuriser les paiements et la trésorerie de vos clients.

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Ce qu’il faut savoir sur la déclaration de créances

La déclaration de créances : une formalité obligatoire

La déclaration de créances est une démarche permettant à un créancier d’obtenir un remboursement et/ou une indemnisation sur des factures impayées. Il s’agit de lister ces dernières et de déclarer leur nature et leur montant.

Dans le cas d’une procédure collective, l’entreprise se trouvant en état de cessation des paiements n’est pas autorisée à s’acquitter des dettes contractées antérieurement à la procédure et se retrouve donc protégée contre d’éventuelles poursuites judiciaires.

Cette procédure ne garantit pas le remboursement de la créance, mais elle demeure le seul moyen de la faire reconnaître officiellement.

Les différentes procédures

Lorsqu’une entreprise rencontre des difficultés financières, une demande d’ouverture de procédure collective peut être effectuée par le débiteur lui-même (donc l’entreprise ou le dirigeant), le créancier (si ce dernier prouve que le débiteur est en situation de cessation des paiements) ou par le procureur de la République en cas d’antécédents (irrégularité, plainte ou signalement).
Selon la situation du débiteur, une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire sera entamée. Le mandataire judiciaire est alors tenu d’informer les créanciers qui devront déposer une déclaration de créances.

Qui effectue la déclaration de créances ?

La déclaration de créances doit être effectuée par le débiteur, autrement dit le représentant légal de l’entreprise ou par un mandataire (commissaire de justice, avocat, juriste, cabinet de recouvrement) ayant au préalable obtenu une délégation de pouvoir.

Sous quel délai déposer une déclaration de créances ?

Le dépôt de la déclaration de créances doit être effectué au plus tôt et au plus tard deux mois après la publication au BODACC (Bulletin Officiel des Annonces Civiles et Commerciales) et cela peu importe le type de procédure en cours.
Passé ce délai, il restera le recours par la voie judiciaire. En cas de force majeure, une requête en relevé de forclusion pourra être déposée au greffe du tribunal de commerce dans un délai de 6 mois à compter de la publication au BODACC. Suite à cette requête, un délai supplémentaire d’un mois pourra être accordé au créancier.

A noter que si les créanciers ne sont pas en France ou si la procédure collective a été ouverte en outre-mer, un délai supplémentaire de deux mois est accordé afin d’effectuer la procédure de déclaration de créances.
Les créanciers reçoivent l’avis de déclaration de créances par courrier recommandé avec avis de réception dans les 15 jours suivant l’ouverture de la procédure collective.

La déclaration de créances : mode d’emploi

Focus sur les créances à déclarer

La déclaration de créances concerne à la fois les créances antérieures et postérieures à l’ouverture de la procédure collective ainsi que les créances garanties par une sûreté, autrement dit un gage ou une hypothèque. Pour ces dernières, il sera nécessaire de préciser la nature de la sûreté et les biens concernés.

Par ailleurs, les salaires et indemnités des employés, autrement dit les créances salariales et les pensions alimentaires, telles que les créances alimentaires n’ont pas à être déclarées, car elles seront payées de façon automatique et en priorité conformément à la procédure collective.

Les mentions obligatoires de la déclaration de créances

La déclaration des créances doit comporter certaines informations, notamment :
• l’identité du créancier et du débiteur ;
• la date d’ouverture et la nature de la procédure collective ;
• le montant de la créance à la date de l’ouverture de la procédure ou du moins une estimation précise de la créance.
• Etc.

S’il y a lieu, le montant des intérêts de retard et les majorations devront également figurer dans la déclaration de créances.

De plus, certains documents devront être joints à la demande, tels que les copies des factures, des bons de commande, de livraison, des contrats ou encore le document de délégation de pouvoir en cas de mandataire désigné dans la procédure.

À qui doit être adressée la déclaration de créances ?

Il est important d’adresser la déclaration de créances auprès de la bonne personne sous peine de forclusion. Elle doit être adressée au mandataire judiciaire en cas de procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire ou au liquidateur en cas de liquidation judiciaire.

L’envoi de la déclaration de créances

L’envoi de la déclaration de créances doit impérativement être réalisé en bonne et due forme au risque qu’elle soit rejetée. Sa forme reste libre, mais il est préconisé d’utiliser le formulaire Cerfa n°10021*10 et de l’envoyer par courrier recommandé électronique.

Pour plus de sécurité et de fiabilité, les juristes, avocats et cabinets de recouvrement ont l’habitude d’utiliser une Lettre Recommandée Electronique (LRE) AR24. Strict équivalent juridique du recommandé papier avec accusé de réception (article L.100 du Code des procédures civiles d’exécution), ce courrier dématérialisé permet de s’assurer que le mandataire judiciaire ou le liquidateur a bien pris connaissance de votre demande dans les délais réglementaires. En raison de son instantanéité d’envoi et d’acheminement et de son horodatage qualifié, vous gagnez du temps tout en bénéficiant d’une traçabilité certaine.

Que se passe-t-il après la déclaration de créances ?

Quelles sont les étapes qui suivent la déclaration de créances ?

Après le dépôt de la déclaration de créances, cette dernière est scrupuleusement analysée par le mandataire judiciaire ou le liquidateur. Chaque créance va être contrôlée et plus précisément son existence et son montant.

Les créances sont ensuite listées en plusieurs catégories :
• les créances admissibles ;
• les créances rejetées ;
• et enfin, celles qui seront renvoyées devant une autre juridiction.

C’est au juge-commissaire que revient le pouvoir de statuer sur l’état des créances en se basant sur la liste. Cette dernière est ensuite transmise au greffe du tribunal. Les créances sont ensuite rendues publiques et publiées au BODACC.

Les différentes parties, que ce soit, le débiteur, le mandataire ou encore le créancier, ont la possibilité de contester la décision du juge-commissaire dans un délai de 30 jours après publication au BODACC. Ce dernier statuera sur la demande de contestation.

Enfin, le paiement des créances se fera selon un ordre de priorité. Les premières sont les frais de justice. Après les créances garanties par une sûreté, ainsi que les créances fiscales et sociales, viennent ensuite le paiement des salaires, puis les créances postérieures à l’ouverture de la procédure, et enfin les créances antérieures.

Les conséquences en cas d’absence de déclaration de créances

La déclaration hors délai ou le fait de ne pas déclarer les créances peuvent avoir de graves conséquences d’autant plus si vous n’avez pas de motif légitime. D’une part, les créances ne seront pas prises en compte lors de la procédure collective ni publiées au BODACC. D’autre part, vous aurez peu de chance de recouvrer les factures impayées, étant donné que les autres créanciers ayant effectué leur déclaration seront prioritaires.

C’est pourquoi il est essentiel, en tant que professionnel du droit ou du recouvrement, d’agir rapidement et efficacement pour préserver les droits de vos clients.Juristes, avocats, cabinets de recouvrement, effectuez en quelques clics seulement et en toute simplicité la déclaration des créances de vos clients grâce à la LRE AR24. En plus de sécuriser le paiement de leurs factures, vous contribuez à améliorer leur trésorerie. Pour commencer à utiliser les services AR24, créez votre compte gratuitement.

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