L’article L145-1 1° du Code de commerce relatif au bail commercial dispose que :
« Les dispositions du présent chapitre s’appliquent aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité, que ce fonds appartienne, soit à un commerçant ou à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés, soit à un chef d’une entreprise immatriculée au répertoire des métiers, accomplissant ou non des actes de commerce ».
En résumé, le statut des baux commerciaux répond aux conditions suivantes :
Un bail,
Un local ou un immeuble,
Un fonds commercial, industriel ou artisanal,
Une immatriculation au RCS ou au répertoire des métiers.
Ces conditions sont cumulatives.
Le bail professionnel quant à lui est un contrat de location portant sur un local qui sert à une activité qui n’est ni commerciale, ni artisanale, ni industrielle, ni agricole. Il est destiné aux « activités professionnelles » [1].
Le bail professionnel est plus souple et laisse place à plus de liberté contractuelle. Le bail commercial est quant à lui plus encadré juridiquement.
- 1. La distinction entre bail professionnel et bail commercial en raison de l’activité du preneur.
Le bail commercial et le bail professionnel sont utilisés pour des activités distinctes.
Alors que le bail commercial est utilisé pour l’exercice d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale, le bail professionnel s’adresse principalement aux professionnels exerçant une activité non commerciale (c’est le cas notamment des professionnels libéraux, qu’ils exercent une activité réglementée ou non).
Les titulaires de baux professionnels sont souvent des professionnels de santé, des personnes exerçant des professions juridiques, les professionnels techniques ou encore des personnes exerçant une profession libérale non réglementée (avocats, experts-comptables, médecins, conseils en gestion, consultants…). Leurs revenus doivent être imposés dans la catégorie de bénéfices non commerciaux.
S’il est possible de se soumettre volontairement au statut des baux commerciaux pour une activité qui n’est ni commerciale, industrielle ou artisanale, l’inverse n’est pas vrai, et il n’est pas possible de se soumettre volontairement au statut des baux professionnels alors qu’on relève de la catégorie des baux commerciaux.
- 2. La distinction entre bail professionnel et bail commercial en raison de la durée du bail.
Le bail commercial est conclu pour une durée d’au moins 9 ans. L’article L145-4 alinéa 1er dispose en effet que :
« La durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans ».
Toutefois, on parle du bail « 3, 6, 9 », car le preneur a la faculté de donner congé tous les 3 ans, pour la fin de la période triennale.
Il est possible de conclure un bail pour une durée inférieure, mais ce bail, dérogatoire, ne sera pas soumis aux statuts des baux commerciaux. Le bail de courte durée ne pourra pas dépasser 3 ans, qu’il s’agisse de la conclusion d’un bail unique ou par le cumul de baux successifs [2].
Il est également possible de conclure un bail saisonnier, mais ce régime ne sera pas abordé ici.
A l’arrivée du terme du bail commercial, si ce dernier se poursuit sans réaction des parties, on parle de « tacite prolongation ».
Cette tacite prolongation n’est pas limitée dans la durée, et pour y mettre fin, il faut qu’un congé soit adressé par le bailleur ou le locataire, à tout moment, mais au moins 6 mois à l’avance, et pour le dernier jour du trimestre civil. Dans ce cas, le bail se prolonge aux mêmes clauses, charges et conditions, sans formation d’un nouveau contrat. Le loyer continue de varier par le jeu de la clause d’indexation qui aura été insérée dans le bail, ou de la révision triennale légale de l’article L145-38 du Code de commerce.
Conseil pratique : L’attention du preneur doit être attirée sur le danger de laisser se poursuivre le bail, au-delà de 12 ans.
En effet, d’une part, le loyer peut être déplafonné à la demande du bailleur ; d’autre part, le lissage du nouveau loyer n’est pas prévu par les textes. En effet, le législateur ne vise pas cette hypothèse au dernier alinéa de l’article L145-34 du Code de commerce instituant le lissage du loyer déplafonné.
Le bail professionnel est quant à lui conclu pour une durée minimum de 6 ans [3].
Si le bail professionnel se poursuit une fois arrivé à son terme, sans qu’une partie n’ait notifié à l’autre son souhait de ne pas renouveler le contrat à son expiration, il est reconduit tacitement pour une même durée.
Prudence pour les bailleurs ! Si vous ne souhaitez pas renouveler le bail portant sur vos locaux professionnels, il ne faut pas rester inactif à l’arrivée du terme initialement convenu. Il convient de notifier au locataire, 6 mois avant l’arrivée du bail, votre volonté de ne pas renouveler le bail.
- 3. La distinction entre bail professionnel et bail commercial quant aux modalités de révision du loyer.
En matière de bail commercial, la révision du loyer peut intervenir légalement à l’issue de chaque période triennale ou à tout moment en cas de clause d’échelle mobile (ou clause d’indexation).
Dans le cadre d’un bail professionnel, il n’y a pas de révision « légale », mais les parties peuvent prévoir, dans le contrat de bail, une possibilité de réviser le loyer.
L’indice en cas de révision du loyer sera différent si l’on se place en matière de bail professionnel ou commercial. Dans le cadre d’un bail professionnel, c’est l’indice des loyers des activités tertiaires qui s’appliquera (ILAT), alors que pour un bail commercial, l’indice à retenir est l’indice trimestriel des loyers commerciaux (ILC) pour les activités commerciales ou artisanales, ou l’ILAT pour les autres activités.
- 4. La distinction entre bail professionnel et bail commercial quant à la répartition des charges, impôts, taxes et redevances.
La loi Pinel est venue encadrer la répartition des charges entre le bailleur et le locataire en matière de bail commercial avec notamment l’obligation d’établir un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances.
A cet égard, l’article R145-35 du Code de commerce liste les dépenses qui ne peuvent être mises à la charge du locataire :
Les grosses réparations visées à l’article 606 du Code civil ;
Le coût des travaux ayant pour objet de remédier à la vétusté ou de mettre en conformité avec la réglementation le local loué ou l’immeuble dans lequel il se trouve, dès lors que ces travaux relèvent des grosses réparations ;
Les impôts, notamment la contribution économique territoriale (CFE et CVAE), taxes et redevances liées à la propriété des locaux ;
Les honoraires du bailleur liés à la gestion des loyers du local loué ;
Les charges, impôts, taxes, redevances et le coût des travaux portant sur des locaux vacants ou imputables à d’autres locataires.
Toute clause mettant à la charge du locataire les charges ci-dessus est réputée non écrite, prudence donc lors de la rédaction des clauses relatives à la répartition des charges.
La loi est en revanche particulièrement silencieuse concernant la répartition des charges du bail professionnel.
En cas de bail professionnel, il appartient donc au bailleur et au preneur de se mettre d’accord sur la répartition des charges, en insérant une clause spécifique au sein du bail.
Si le bail professionnel ne prévoit rien sur la répartition des travaux, le locataire devra prendre en charge les travaux listés à l’article 1754 du Code civil (réparations d’entretiens et menues réparations) et le bailleur les réparations autres que locatives [4].
Contrairement au bail commercial, l’article 606 du Code civil, qui est d’ordre public pour le bail commercial, ne l’est pas pour le bail professionnel.
C’est pourquoi la rédaction du bail professionnel doit être particulièrement rigoureuse.
- 5. La distinction entre bail professionnel et bail commercial relativement au droit au renouvellement du bail.
Le statut des baux commerciaux permet au preneur de bénéficier du droit au renouvellement de son bail commercial. Aucune clause ne peut priver un locataire commercial de son droit au renouvellement, qui est un droit d’ordre public.
Dans le cadre d’un bail professionnel, le bailleur a la possibilité de mettre fin au bail à l’expiration de sa durée, sans justification et sans contrepartie financière. Le bailleur doit simplement avertir le locataire en respectant un préavis de 6 mois.
- 6. La distinction entre bail professionnel et bail commercial quant à aux modalités de résiliation du bail.
La faculté de résiliation du preneur.
Dans le cadre du bail commercial, le preneur peut donner congé :
A l’expiration d’une période triennale, sans motif particulier. Le preneur devra alors respecter un préavis d’au moins 6 mois avant l’expiration de la période triennale ;
A tout moment pour départ à la retraite ou invalidité.
Le locataire qui a conclu un bail professionnel a quant à lui la possibilité de la résilier le bail à tout moment, moyennant un préavis de 6 mois. C’est l’article 57A de la loi du 23 décembre 1986 qui offre cette possibilité au titulaire d’un bail professionnel. Dans ce cas, le locataire n’aura pas à motiver son congé ni à payer la moindre pénalité financière.
La faculté de résiliation du bailleur.
Dans le cadre du bail commercial, le bailleur ne dispose de la faculté triennale de résiliation que pour les motifs suivants :
La construction ou la reconstruction de l’immeuble ;
La surélévation de l’immeuble ;
L’exécution de travaux prescrits ou autorisés.
Ces congés sont assez peu utilisés en pratique puisque le bailleur devra verser l’indemnité d’éviction à son locataire ou offrir un local de remplacement équivalent en cas de travaux.
Même s’il offre un local de remplacement, le bailleur reste en outre tenu au paiement d’une indemnité restreinte destinée à compenser la privation temporaire de jouissance, la moins-value éventuelle du fonds et les travaux normaux de déménagement et réinstallation.
En matière de bail professionnel, le bailleur peut notifier son intention de ne pas renouveler le contrat de bail à son expiration en respectant un préavis de 6 mois. Il n’a pas la possibilité, en revanche, de résilier le bail à tout moment comme peut le faire le locataire.
-7. La distinction entre bail professionnel et bail commercial relativement à la possibilité de sous-location et de cession du droit au bail.
La sous-location.
Le locataire titulaire d’un bail commercial ne peut sous-louer son local que si une clause du bail le prévoit.
Le locataire titulaire d’un bail professionnel peut sous-louer son local à moins qu’une clause le lui interdise.
Le principe est donc inversé que l’on soit en matière de bail commercial ou de bail professionnel.
La cession du droit au bail.
En matière de bail commercial, la cession ne peut pas être interdite si elle intervient dans le cadre de la cession du fonds de commerce, industriel ou artisanal, mais ses modalités peuvent être encadrées. Il s’agit d’une disposition d’ordre public. Toute clause d’un bail commercial qui interdirait au locataire de céder son bail à l’acquéreur de son fonds de commerce serait réputée non écrite [5].
La possibilité de céder son bail professionnel est généralement autorisée dans le cas d’un bail professionnel, mais peut être interdite, totalement ou partiellement, dans le contrat de bail.
Là encore, les parties disposent d’une grande souplesse dans la rédaction de leur bail professionnel.
Il est donc indispensable de se faire conseiller dans la rédaction de chacune des clauses d’un bail, qu’il soit commercial ou professionnel, pour s’assurer de la sécurité juridique des intérêts du preneur et du bailleur.