Offres de reclassement ne comportant pas les 6 mentions légales = licenciement économique sans cause.

Par Frédéric Chhum, Avocat et Elise de Langlard, Juriste.

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Explorer : # licenciement économique # obligation de reclassement # droit du travail # dommages-intérêts

Ce que vous allez lire ici :

Une salariée licenciée pour motif économique a contesté son licenciement en raison d'une offre de reclassement jugée imprécise. La Cour de cassation a confirmé que l'employeur n'avait pas respecté les exigences légales, rendant le licenciement sans cause réelle et sérieuse, entraînant des dommages-intérêts pour la salariée.
Description rédigée par l'IA du Village

Dans un arrêt du 23 octobre 2024 (n° 23-19629) publié au Bulletin, la Cour de cassation rappelle avec fermeté l’importance d’une offre de reclassement claire et détaillée en cas de licenciement économique.

Selon l’article L1233-4 du Code du travail, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017, les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

Aux termes de l’article D1233-2-1, alinéa II, du même code, dans sa rédaction modifiée par le décret n° 2017-1725 du 21 décembre 2017, ces offres écrites précisent l’intitulé du poste et son descriptif, le nom de l’employeur, la nature du contrat de travail, la localisation du poste, le niveau de rémunération et la classification du poste.

A défaut de l’une de ces 6 mentions, l’offre est imprécise, ce qui caractérise un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement et prive le licenciement de cause réelle et sérieuse

Cette décision doit être approuvée.

-

I. Faits.

Une salariée a été embauchée comme vendeuse spécialisée par la société Espace Santé Grau.

Elle a par la suite été licenciée pour motif économique dans le cadre d’une réorganisation visant à sauvegarder la compétitivité de l’entreprise.

Avant son licenciement, une offre de reclassement lui a été proposée, par écrit, le 12 juillet 2019 sur un poste de magasinière, avec maintien de son ancienneté et de son niveau de rémunération.

La salariée a refusé cette offre une semaine plus tard, et a accepté un contrat de sécurisation professionnelle (CSP).

Elle a ensuite saisi les juridictions prud’homales pour contester la validité de la rupture de son contrat de travail.

La Cour d’appel de Pau, qui a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison d’un manquement à l’obligation de reclassement.

La société s’est pourvue en cassation.

II. Moyens.

Tout d’abord, la société estimait que l’absence d’informations comme l’adresse précise, l’activité de l’entreprise ou la classification du poste dans l’offre ne devait pas entraîner une telle sanction, ces éléments n’étant pas expressément exigés par le Code du travail.

Ensuite, il soutenait que les informations fournies (localisation générale et maintien de la rémunération) étaient suffisantes pour permettre à la salariée de prendre une décision.

Et enfin, il faisait valoir que la salariée avait refusé l’offre sans demander de précisions supplémentaires, ce qui montrait qu’elle disposait d’éléments suffisants pour se positionner.

III. Solution.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi de l’employeur.

Elle a jugé que l’offre de reclassement, en omettant plusieurs mentions obligatoires prévues par l’article D1233-2-1 du Code du travail, était imprécise et non conforme aux exigences légales.

En conséquence, elle a jugé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, ce qui justifie une condamnation de l’employeur au versement de dommages-intérêts au profit de la salariée.

IV. Analyse.

La décision met en lumière l’importance du formalisme strict des offres de reclassement dans le cadre d’un licenciement économique.

En effet, selon l’article L1233-4 du Code du travail, des obligations strictes sont imposées à l’employeur dans le cadre d’un licenciement pour motif économique.

Notamment, avant tout licenciement, l’employeur doit avoir accompli tous les efforts possibles de formation et de reclassement pour le salarié.

Ce reclassement doit être proposé sur un poste équivalent (ou, à défaut, inférieur avec l’accord du salarié) et respecter les critères de la même catégorie professionnelle et d’une rémunération équivalente.

Les propositions doivent par ailleurs être adaptées à chaque salarié, en tenant compte de leur poste actuel, de leur qualification, et des opportunités de reclassement disponibles dans l’entreprise ou au sein du groupe.

En outre, l’article D1233-2-1 précise que les offres de reclassement doivent être écrites et précises.

Notamment, elles doivent inclure toutes les informations essentielles, à savoir l’intitulé et le descriptif précis du poste, la classification du poste, la nature du contrat, le nom de l’employeur, la localisation exacte et le niveau de rémunération.

En l’espèce, l’offre ne précisait ni le nom de l’employeur, ni la classification du poste, ni l’adresse exacte, ni la nature du contrat.

Seules des informations minimales avaient été communiquées (mention d’un intitulé général ("poste de magasinière"), localisation approximative et maintien de la rémunération), ce qui a été jugé insuffisant pour permettre à la salariée de prendre une décision éclairée.

Ainsi, l’imprécision de l’offre traduit un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement, ce qui entraîne l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.

En substance, cette jurisprudence impose une vigilance accrue aux employeurs, car des erreurs dans le formalisme de l’offre de reclassement peuvent avoir des conséquences financières lourdes, comme le versement de dommages-intérêts.

Même une omission partielle, comme l’absence de la classification du poste ou de la nature du contrat, peut entraîner l’annulation du licenciement. Dès lors, une offre imprécise est assimilée à un manquement formel, quelle que soit la bonne foi de l’employeur.

Au final, ce cadre juridique garantit au salarié une information complète pour évaluer sereinement les opportunités qui lui sont proposées et ainsi protéger ses droits.

Source.
Cass. soc. 23 oct. 2024 n° 23-19.629 publié au bulletin.

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021)
Elise de Langlard juriste
Chhum Avocats (Paris, Nantes, Lille)
chhum chez chhum-avocats.com
www.chhum-avocats.fr
http://twitter.com/#!/fchhum

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