Est, dès lors, irrecevable le recours formé contre une ordonnance rejetant une exception de nullité et ordonnant, avant dire droit, une expertise informatique des scellés.
C’est ce qu’affirme la Cour de cassation dans un arrêt de la chambre criminelle publié au bulletin du 13 mars 2023 (n° 22-83.757).
1) Faits et procédure.
Par ordonnance du 17 mai 2022, le juge des libertés et de la détention a autorisé, sur la demande de l’administration fiscale, deux autres juges des libertés et de la détention du même tribunal judiciaire à procéder à des opérations de visite et de saisie dans différents locaux susceptibles d’être le domicile ou le cabinet de M. [H] [J], ancien avocat.
Lors des opérations, le délégué du bâtonnier de l’ordre des avocats s’est opposé à la saisie de divers documents numériques et courriels. Ceux-ci ont été transférés sur une clé USB, qui a été placée sous scellé fermé et transmise, avec le procès-verbal mentionnant les objections à la saisie, au juge des libertés et de la détention afin qu’il statue sur la contestation.
Par ordonnance du 30 mai 2022, le juge des libertés et de la détention qui avait autorisé les opérations de visite et de saisie a refusé de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité, rejeté une exception de nullité prise de ce que le juge des libertés et de la détention ne pouvait à la fois autoriser la saisie, la pratiquer, puis juger de sa contestation sans méconnaître le principe d’indépendance et d’impartialité des juridictions, ordonné avant dire droit une expertise informatique et renvoyé l’examen de l’affaire à une date ultérieure.
M. [J] et le bâtonnier de l’ordre des avocats au barreau de Marseille ont relevé appel de cette décision.
2) Moyens.
Le premier moyen critique l’ordonnance attaquée en ce qu’elle a déclaré irrecevable le recours de M. [J] contre l’ordonnance du JLD de Marseille du 30 mai 2022 sans avoir entendu les parties.
Le second moyen critique l’ordonnance attaquée en ce qu’elle a déclaré irrecevable le recours de M. [J] contre l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Marseille du 30 mai 2022, alors
« qu’aux termes de l’article 56-1 alinéa 8 du Code de procédure pénale, toute décision rendue par le juge des libertés et de la détention sur la contestation du bâtonnier quant à l’irrégularité des opérations de saisie effectuées au domicile ou au cabinet d’un avocat peut faire l’objet d’un recours suspensif devant le président de la chambre de l’instruction ; qu’aucune disposition ni aucun principe ne limite aux seules décisions du juge des libertés et de la détention ordonnant la restitution des scellés contestés ou leur versement à la procédure, l’exercice de ce recours ».
3) Réponse de la cour.
Selon l’article 56-1, alinéas 4 à 7, du Code de procédure pénale, la décision prise par le juge des libertés et de la détention à la suite de la saisie, à laquelle s’est opposé le bâtonnier, d’un document ou d’un objet dans le cabinet d’un avocat ou à son domicile, est, soit dans le sens de la restitution immédiate du scellé, soit dans le sens de son versement à la procédure.
Il en résulte que le recours, prévu par l’article 56-1, alinéa 8, du même code, devant le président de la chambre de l’instruction, n’est ouvert que contre les décisions qui tranchent cette contestation en prononçant l’une ou l’autre de ces mesures.
En conséquence, c’est à juste titre que le président de la chambre de l’instruction a déclaré irrecevable le recours formé contre l’ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant l’exception de nullité prise de la violation du principe d’indépendance et d’impartialité des juridictions et ordonnant, avant dire droit, une expertise informatique des scellés, les requérants conservant la possibilité de soulever à nouveau les moyens de nullité et exceptions rejetés par le premier juge à l’occasion du recours formé, le cas échéant, devant le président de la chambre de l’instruction, contre la décision du premier juge se prononçant sur le sort des scellés.
Dès lors, le second moyen n’est pas fondé et le premier moyen, pris d’un grief relatif aux modalités d’examen du recours, est sans objet.
4) Analyse.
C’est un des premiers arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation, en matière de perquisition en cabinet d’avocat, qui fait suite à la loi n°2021-1729 du 21 décembre 2021 sur la confiance dans l’institution judiciaire.
Le JLD avait autorisé, sur la demande de l’administration fiscale, deux autres juges des libertés et de la détention du même tribunal judiciaire à procéder à des opérations de visite et de saisie dans différents locaux susceptibles d’être le domicile ou le cabinet de M. [H] [J], ancien avocat.
Lors des opérations, le délégué du bâtonnier de l’ordre des avocats s’est opposé à la saisie de divers documents numériques et courriels.
Ceux-ci ont été transférés sur une clé USB, qui a été placée sous scellé fermé et transmise, avec le procès-verbal mentionnant les objections à la saisie, au juge des libertés et de la détention afin qu’il statue sur la contestation.
Par ordonnance du 30 mai 2022, le JLD avait autorisé les opérations de visite et de saisie a refusé de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité, rejeté une exception de nullité prise de ce que le juge des libertés et de la détention ne pouvait à la fois autoriser la saisie, la pratiquer, puis juger de sa contestation sans méconnaître le principe d’indépendance et d’impartialité des juridictions, ordonné avant dire droit une expertise informatique et renvoyé l’examen de l’affaire à une date ultérieure.
M. [J] et le bâtonnier de l’ordre des avocats au barreau de Marseille ont relevé appel de cette décision.
Dans son arrêt du 15 mars 2023, la Cour de cassation considère qu’est irrecevable le recours formé contre une ordonnance de JLD rejetant une exception de nullité.
4.1) Contestation de la décision du JLD.
Dans les cinq jours de la réception de ces pièces, le juge des libertés et de la détention statue sur la contestation par ordonnance motivée.
A cette fin, le JLD entend le magistrat qui a procédé à la perquisition et, le cas échéant, le procureur de la République, ainsi que l’avocat au cabinet ou au domicile duquel elle a été effectuée et le bâtonnier ou son délégué.
Il peut ouvrir le scellé en présence de ces personnes.
S’il estime qu’il n’y a pas lieu à saisir le document ou l’objet, le juge des libertés et de la détention (JLD) ordonne sa restitution immédiate, ainsi que la destruction du procès-verbal des opérations et, le cas échéant, la cancellation de toute référence à ce document, à son contenu ou à cet objet qui figurerait dans le dossier de la procédure.
Dans le cas contraire, il ordonne le versement du scellé et du procès-verbal au dossier de la procédure. Cette décision n’exclut pas la possibilité ultérieure pour les parties de demander la nullité de la saisie devant, selon les cas, la juridiction de jugement ou la chambre de l’instruction (art. 56-1 CPP modifié par la loi du 22 décembre 2021).
4.2) Recours suspensif contre la décision du JLD dans un délai de 24h devant le président de la chambre de l’instruction.
C’est une nouveauté de la loi du 22 décembre 2021.
La décision du juge des libertés et de la détention (JLD) peut faire l’objet d’un recours suspensif dans un délai de vingt-quatre heures, formé par le procureur de la République, l’avocat ou le bâtonnier ou son délégué devant le président de la chambre de l’instruction.
Celui-ci statue dans les cinq jours suivant sa saisine, selon la procédure prévue au cinquième alinéa du présent article.
Ce recours peut également être exercé par l’administration ou l’autorité administrative compétente (c’est-à-dire l’administration fiscale ou douanière) (art. 56-1 CPP modifié par la loi du 22 décembre 2021).
Un pourvoi en cassation est possible à l’encontre de la décision de la chambre d’instruction.
Dans son arrêt du 13 mars 2023, la Cour de cassation affirme que le recours devant le président de la chambre de l’instruction, prévu à l’alinéa 8 de l’article 56-1 du Code de procédure pénale, de la décision prise par le JLD sur la contestation élevée par le bâtonnier, à la suite de la saisie d’un document ou d’un objet dans le cabinet d’un avocat ou à son domicile, n’est ouvert que contre celle qui prononce soit la restitution immédiate du scellé soit son versement à la procédure.
Cette décision fait une application restrictive de l’article 56-1 alinéa 8 relatif au recours suspensif devant le président de la chambre de l’instruction contre l’ordonnance du JLD en cas de perquisition en cabinet d’avocats.
Source.
C. cass. 13 mars 2023, n°22-83.757.
Perquisitions au domicile ou cabinet d’un avocat : les nouvelles règles à partir du 1er mars 2022.
Loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire.