I. Résumé des faits
En janvier 2009, un directeur administratif saisit le Conseil de Prud’homme d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail pour harcèlement moral.
Au mois d’avril 2009, alors que le Conseil n’avait toujours pas statué sur sa demande, le salarié et son employeur signent une rupture conventionnelle du contrat de travail prévoyant le paiement d’une indemnité spécifique de rupture fixée à 80 000 euros .
La convention est homologuée par le Conseil de Prud’homme le 29 mai 2009, et le salarié quitte l’entreprise, tout en maintenant sa demande de résiliation judiciaire !
Bien évidemment, cette dernière sera rejetée par le Conseil de prud’hommes, au motif qu’elle est devenue sans objet.
Insatisfait, le salarié interjette appel et, dans ses conclusions datées du mois de décembre 2010, réclame l’annulation de la rupture conventionnelle en raison d’un litige préexistant entre les parties et d’un contexte de harcèlement moral.
Ni la Cour d’appel, ni la Cour de cassation n’ont accueilli ses prétentions.
En effet l’annulation de la rupture conventionnelle aurait dû être demandée dans le délai d’un an suivant l’homologation (article L. 1237-14 du Code du travail). De fait, le salarié étant hors délai pour demander l’annulation de la convention de rupture, le juge d’appel n’avait pas à statuer sur sa demande de résiliation judiciaire devenue sans objet, peu important que cette action ait été introduite en premier.
En clair, la rupture conventionnelle avait absorbé la rupture du contrat de travail :
« Mais attendu qu’ayant constaté que l’annulation de la rupture conventionnelle n’avait pas été demandée dans le délai prévu par l’article L. 1237-14 du code du travail, la cour d’appel n’avait plus à statuer sur une demande, fût-elle antérieure à cette rupture, en résiliation judiciaire du contrat de travail devenue sans objet ; que le moyen n’est pas fondé »
II. Le double enseignement de cet arrêt
- L’employeur qui signe une rupture conventionnelle, alors qu’une procédure judiciaire est en cours, s’expose au risque de remise en cause de cette rupture par le salarié.
- Pris a contrario, l’arrêt enseigne que si le salarié avait contesté la rupture conventionnelle dans les délais, et qu’elle avait été annulée par le juge d’appel, ce dernier n’aurait eu d’autre choix que d’examiner la demande de résiliation judiciaire.
En conséquence, une rupture conventionnelle homologuée durant une action en résiliation judiciaire neutralisera cette dernière, excepté si le salarié réclame l’annulation de ladite rupture dans les 12 mois suivant son homologation.
Cass. soc., 10 avril 2013, n° 11-15.651