Une banque prête des fonds à une société qui vient d’être constituée.
Deux prêts sont consentis :
l’un destiné à financer l’acquisition d’un droit au bail,
l’autre sous la forme d’une facilité de caisse.
Le premier prêt est garanti par le cautionnement solidaire de la gérante de cette société nouvellement créée et par une autre associée.
L’associée de la société s’est porté seule caution pour la facilité de caisse.
La société ne peut rembourser les concours et est placée en redressement puis en liquidation judiciaire. La banque déclare sa créance au passif de la société puis elle assigne les cautions en paiement.
Les cautions en défense invoquent la responsabilité de la banque qui a octroyé un crédit inapproprié et qui a manqué à son obligation de mise en garde.
La Cour d’appel de Paris dans un arrêt du 10 décembre 2009 se voit condamner au paiement d’une somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts et ordonné la compensation de cette sommes avec les sommes dues par les cautions.
La Banque saisit la Cour de cassation.
La banque forme plusieurs griefs à l’encontre de la décision de la Cour d’appel.
La Cour de cassation confirme cependant la décision de la Cour d’appel et elle rejette l’ensemble des arguments adverses.
1- La banque reproche à la Cour d’appel d’avoir inversé la charge de la preuve. La Cour d’appel reprochait à la banque de ne pas être en mesure de produire un business plan de la société ce qui justifiait pour la Cour d’appel que la banque avait octroyé le crédit sans être en mesure d’analyser son adéquations aux moyens de la Société. La banque estime que c’était aux cautions de démontrer la faute de la banque et non l’inverse.
La Cour de cassation répond que la Cour a relevé qu’aucune comptabilité prévisionnelle n’avait été fournie ou demandée par la banque au moment d’accorder le concours. La Cour d’appel avait donc valablement pu juger que la banque n’était pas en mesure d’apprécier l’adaptation de ce crédit aux capacités financières de la Société.
Ceci pouvait donc permettre de retenir la responsabilité de la banque qui avait eu un comportement fautif.
2 - la banque reproche encore à la Cour d’appel d’avoir pu qualifier la caution dirigeante de non avertie alors que la caution dirigeante est présumée avertie. La Banque plus particulièrement estime la motivation ayant permis d’écarter cette présomption insuffisante ou incorrecte.
La Cour de cassation ratifie le raisonnement de la Cour d’appel. La dirigeante de la nouvelle société était simplement titulaire d’une maîtrise de lettre et d’un DESS d’information et de la documentation. Elle n’avait ensuite eu qu’une activité de documentaliste.
La Cour d’appel avait ainsi valablement caractérisé le caractère non avertie de la caution.
3 - la banque reproche encore à la Cour d’appel de ne pas avoir qualifiée l’associée d’avertie alors qu’elle avait participé aux opérations de gestion. La Cour de cassation sur ce point juge que cette question doit être souverainement appréciée par les juges du fonds.
Cette décision apporte deux enseignements apportant dans ces contentieux extrêmement fréquents.
Sur la question de la faute de la banque, la Cour de cassation semble faire preuve d’un degré de sévérité nouveau. La banque doit désormais clairement obtenir les éléments lui permettant de s’assurer que le crédit est adapté aux capacités financières de la Société. Faute d’avoir demandé un état prévisionnel, la banque voit sa responsabilité engagée.
La Cour de cassation par sa position réduit le champ de la caution avertie notamment lorsque le concours est accordé au moment de la création. La caution même dirigeante d’une société nouvelle sauf à avoir exercé des fonctions de direction ou d’avoir effectué des études de gestion à toute chance d’être jugée non avertie.
Cette question est d’importance car elle ouvre ensuite une protection complémentaire pour la caution.
Cette décision devrait donc être invoquée fréquemment dans les instances similaires en cours ou à venir par les cautions.