Hypothèse de résiliation de plein droit sans préavis et sans indemnité d’un marché de travaux privé.

Par Grégory Rouland, Avocat.

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Explorer : # résiliation de contrat # sécurité des chantiers # tromperie sur la qualité des travaux # indemnisation

Un maître d’ouvrage est bien fondé à notifier la résolution d’un marché sans mise en demeure préalable à un entrepreneur qui méconnaît les règles d’hygiène et de sécurité sur un chantier.

-

Un maître d’ouvrage avait confié un marché de travaux tous corps d’état à un entrepreneur.

Une clause dans le marché prévoyait que celui-ci pourrait être résilié « dans le cas de tromperie grave et dûment constatée sur la qualité des matériaux ou sur la qualité d’exécution des travaux. »

Ainsi, le maître de l’ouvrage a constaté durant le cours des travaux que les sous-traitants de l’entrepreneur ne respectaient pas les règles en matière de sécurité des ouvriers et de prévention des accidents.

C’est pourquoi le maître d’ouvrage a notifié au constructeur la résiliation unilatérale du marché à ses torts exclusifs, en s’appuyant sur l’article 22. 1. 2. 1 de la norme française AFNOR P 03-001 selon lequel :

« Le marché pourra être résilié de plein droit, sans accomplissement d’aucune formalité judiciaire, aux torts de l’entrepreneur [...] sans mise en demeure, dans le cas de tromperie grave et dûment constatée sur la qualité des matériaux ou sur la qualité d’exécution des travaux. »

Le constructeur a voulu contester la résiliation et être indemnisé. Il a alors assigné le maître d’ouvrage à cette fin, mais aussi pour que les comptes soient établis. Mais le constructeur fut débouté et se pourvut en cassation.

Mais la Cour de cassation a donné raison aux juges du fond et les a approuvé d’avoir décidé « par une interprétation souveraine exclusive de dénaturation de cette clause, que la défaillance totale et persistante [du constructeur] à faire respecter par ses sous-traitants les prescriptions en vigueur en matière de sécurité des ouvriers et de prévention des accidents, indispensables à la réalisation des ouvrages dans les règles de l’art, était constitutive d’une tromperie sur la qualité d’exécution des travaux. »

Dès lors, le maître de l’ouvrage était parfaitement fondé à résilier le marché de plein droit et sans préavis.

La leçon très simple de cet arrêt est la suivante :

- Tout manquement aux règles de sécurité sur un chantier constitue une tromperie sur la qualité d’exécution des travaux ;

- Si le maître d’ouvrage laisse faire une telle situation, il risque à tout moment de voir son chantier arrêté. La résiliation de plein droit du contrat et sans préavis est donc une sanction logique compte tenu de la norme NF P 03-001 ;

- le maître d’ouvrage n’a pas à indemniser l’entrepreneur, car la résiliation est, dans cette hypothèse, prononcée à ses torts ;

- Cependant, encore est-il nécessaire que le maître d’ouvrage apporte la preuve du manquement aux règles de sécurité.

Civ. 3e, mai 2012, n°-11-13.011

Grégory Rouland
Docteur en Droit et Avocat
gregory.rouland chez outlook.fr

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