Label "Fait maison" : la cuisine du législateur manquerait-elle de finesse ?

Par Martine Bloch-Weill, CPI.

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Explorer : # label "fait maison" # traçabilité alimentaire # législation alimentaire # consommation

Depuis le 15 juillet, un nouveau label a fait son apparition sur les cartes des restaurants.
C’est un logo représentant une casserole surmontée d’un toit ayant pour vocation d’indiquer au consommateur que le plat qu’il s’apprête à commander et à déguster a été cuisiné entièrement sur place à partir de produits bruts ou de produits traditionnels de cuisine.

-

Cette volonté d’information du consommateur s’inscrit dans une démarche actuelle de traçabilité d’une part et de valorisation du métier de cuisinier d’autre part et s’ajoute à d’autres labels récents tels que « restaurateurs de France » ou « maître restaurateur ».

Ce nouveau label concerne toutefois directement le plat et plus particulièrement le lieu de son élaboration et sa composition.

Et c’est là que la cuisine du législateur devient subtile lorsqu’il convient d’appliquer cette
nouvelle recette.

Nous citerons à titre d’exemple quelques ingrédients plus ou moins savoureux de ce décret n° 2014-797 du 11 juillet 2014 :

  • Il définit le « produit brut » comme un « produit alimentaire n’ayant subi aucune
    modification importante, y compris par chauffage, marinage, assemblage ou une
    combinaison de ces procédés ».

Or, par exemple, un produit est considéré comme brut même s’il est épluché. Toutefois la
pomme de terre ne peut être livrée épluchée pour être considérée comme un produit brut. Il
peut aussi être notamment haché, taillé, fumés, salé ou congelé….

La charcuterie peut entrer dans la composition des plats « faits maison » mais les pâtés en sont expressément exclus.

Les biscuits secs ou les pâtes feuilletées crues sont mentionnés comme pouvant aussi entrer dans la composition des plats bénéficiant de ce label mais les biscuits frais ou les pâtes sablées n’étant pas listés dans les produits autorisés, il convient d’en déduire qu’ils en sont exclus.

  • Par ailleurs, un plat composé d’un produit non brut au sens du décret et non prévu dans
    les exceptions pourra toutefois être présenté comme « fait maison » si la marque du
    produit en question ou le nom du professionnel qui l’a fabriqué est expressément
    indiqué.
  • Il est intéressant aussi de noter que la mention « Les plats « faits maison » sont élaborés
    sur place à partir de produits bruts » est obligatoire pour tous les restaurateurs et les
    traiteurs même si l’établissement ne propose aucun plat pouvant bénéficier du label
    « fait maison ».

Il appartiendra donc au client de déduire que l’établissement choisi ne propose pas de produits faits maison en remarquant l’absence du label ou de la mention « faits maison ».

Rassurons-nous, il est prévu un délai jusqu’au 1er janvier 2015 pour se conformer à cette
nouvelle législation. Cela laissera un peu de temps aux inspecteurs de la Concurrence, de la
Consommation et de la Répression des Fraudes pour digérer ce décret et appliquer avec
gourmandise les dispositions du code de la Consommation concernant les pratiques commerciales déloyales.

Martine BLOCH-WEILL

Associée/Partner

REGIMBEAU
www.regimbeau.eu
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Discussions en cours :

  • Dernière réponse : 15 septembre 2014 à 14:21
    par Alain Restaurants Qui Font a Manger , Le 14 septembre 2014 à 19:03

    Bonjour

    Nous sommes un couple de particuliers qui a créé il y a 2 ans le groupe et l’annuaire des Restaurants Qui Font a Manger de la cuisine maison
    www.restaurantsquifontamanger.fr

    Notre objectif, recenser les "vrais" restaurants qui font du fait maison.
    Suite à la sortie du décret d’application mais aussi à votre article nous aimerions apporter quelques éclaircissements à nos adhérents et lecteurs.

    Notre point d’interrogation porte sur la phrase :
    "Un plat composé d’un produit non mentionné à l’article D.121-13-1 peut être présenté comme “fait maison” dès lors que la marque du produit ou le nom du professionnel qui l’a fabriqué est expressément indiqué"

    Juridiquement, "un" produit, le "un" est-il restrictif ou pas ? En clair un plat qui aurait "deux" produits non mentionnés pourrait-il s’appeler "fait maison" ?

    Autre point, quelle est la définition de "produit" dans cette même phrase. Est-ce un produit tel que défini dans le décret c’est à dire un produit brut, cru... ou cela peut-il être un produit au sens large, un produit élaboré, un ensemble de produits, un produit brut déjà cuit, une sauce, voire même un plat cuisiné ?

    Nous vous remercions par avance du temps que vous pourriez nous accorder
    Dans l’attente de vous lire
    Bien à vous

    • par Martine BLOCH-WEILL , Le 15 septembre 2014 à 14:21

      Bonjour,

      Je vous remercie pour votre lecture attentive et constructive de mon article.

      Il est vrai que les termes de ce décret laissent place à de nombreuses incertitudes.

      Toutefois, à la lecture du décret, je pense qu’il convient de considérer le terme « produit » dans sa définition du décret c’est-à-dire un « produit brut ».

      Par ailleurs l’exception prévue par l’art D.121-13-3 III concernant la possibilité de faire état du label « fait maison » même si le plat est composé d’un produit non mentionné dans le décret devrait à mon sens être interprété de manière limitative dans la quantité mais non dans la nature dudit produit. Ainsi pourrait être mentionnée comme « fait maison » une « crêpe au Nutella® » si la crêpe elle-même répond aux conditions posées par le décret, le Nutella® étant la marque d’un produit élaboré.

      En espérant que l’interprétation qui sera faite de ce décret sera saupoudrée de bon sens aussi bien par les restaurateurs que par les inspecteurs de la DGCCRF.

      Bien à vous

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