Le 20 mars 2022 se tenaient les élections territoriales à Saint-Martin. Une électrice de la collectivité territoriale a voulu faire son devoir de citoyenne en allant voter, comme elle l’avait fait lors des élections précédentes. Il n’en sera rien. La Saint-Martinoise s’est vue refuser le droit de glisser son bulletin dans l’urne, au motif qu’elle est radiée des listes électorales.
La collectivité territoriale oppose à l’électrice un document « électeur INE » lequel indique que le motif de radiation est « motif non récupéré du répertoire électoral unique ».
Une action est donc introduite devant le tribunal de proximité de Saint-Martin et Saint-Barthélemy afin de réinscrire la demandeur sur les listes électorales de Saint-Martin.
Dans la journée du 20 mars, le tribunal de proximité déboute l’électrice. Un pourvoi en cassation est donc formé contre ce jugement. La cassation était inévitable [1].
La Cour de cassation a opéré un bref rappel des textes (I), mais a souhaité préciser un certain nombre de points à l’adresse des juges de proximité qui auront à trancher les litiges lors des prochains scrutins (II).
I. Le rappel des fondements textuels.
Le visa retenu par la deuxième chambre est limpide.
L’article L. 20 II du code électoral aurait dû conduire le tribunal à retenir « l’erreur purement matérielle » dont la carence a même été admise par le président de la collectivité.
La compétence du tribunal de proximité n’était nullement contestée, mais l’occasion a été donnée à la Cour de cassation de répondre aux questions les plus élémentaires, comme celle relative à la compétence du tribunal de proximité.
En matière de contentieux électoral, le juge judiciaire préfère la prudence et un renvoi strict aux textes de référence de sorte qu’il ne lui appartient pas de créer de la jurisprudence dans une matière naturellement dévolue au juge administratif et dans une moindre mesure au conseil constitutionnel.
Un rappel des principaux motifs prévus par le code électoral aurait été salvateur. Les motifs sont de différentes natures et peuvent résulter d’une absence de condition de résidence, une absence de domicile fiscal, l’inscription sur une autre liste [2] ou encore la privation des droits civiques [3].
II. Des précisions pour les élections à venir.
Un certain nombre de formalités doivent être réalisées pour qu’une radiation puisse être opposable à un électeur anciennement inscrit sur les listes.
La Cour de cassation a alimenté son arrêt de telle sorte que les tribunaux de proximité qui traiteront prochainement du contentieux des élections législatives pourront répondre sans difficulté en cas d’erreur matérielle sur une liste électorale. Le problème posé dans le cas d’espèce peut se répéter dans de nombreuses mairies étant donné que le répertoire électoral unique est instauré depuis quelques années.
Ainsi, la Cour de cassation préconise la présence d’une attestation d’omissions sur la liste électorale. La présence de ce document est utile à la constatation d’une carence lors du renouvellement des listes.
Par ailleurs, il peut être souhaitable, sans que la haute juridiction semble en faire un impératif, que l’attestation d’omission porte mention d’une précision indiquant « qu’aucune demande de radiation n’existe pour cet électeur ».
Enfin, il est primordial que le document « électeur INE » indique un motif.
C’est sur ce point que le juge doit faire sa religion. La Cour de cassation rappelle que le tribunal de proximité est incompétent pour se substituer au travail de la commission administrative dans l’établissement de la liste électorale, néanmoins il demeure compétent pour constater une absence de motif, y compris un « motif non récupéré du répertoire électoral unique ». Le juge doit pouvoir motiver sa décision en indiquant un motif tangible de radiation.
Il est à noter néanmoins que la deuxième chambre civile ne fait pas sien l’argument selon lequel il serait nécessaire de recevoir un justificatif de radiation pour que celle-ci produise ses effets.