L’article L1121-1 du Code du travail impose tout d’abord les principes d’intérêt légitime et de proportionnalité : les mesures de contrôle ou de surveillances doivent être « justifiées par la nature de la tâche à accomplir [et] proportionnées au but recherché ».
L’article L1222-4 du même code y ajoute l’obligation d’information préalable du salarié :
« aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance ».
Si l’employeur peut contrôler et surveiller l’activité de ses salariés afin de relever des comportements fautifs et user de son pouvoir disciplinaire, il doit également se conformer à un principe jurisprudentiel fondamental : le principe de loyauté dans l’administration de la preuve (voir notamment Cass. com, 6 dec. 2016, pourvoi n°5-18088).
Bien que restrictives, plusieurs solutions existent afin que l’employeur puisse faire valoir ses droits et garantir la licéité d’une sanction disciplinaire ou d’un licenciement pour faute.
Selon les cas, le travail complémentaire d’un huissier de justice et d’un détective privé peut s’avérer fort intéressant.
La jurisprudence, qui a progressivement construit le dessin des conditions de réalisation des constats par les huissiers de justice, a posé l’interdiction pour ces derniers de procéder à tout constat en faisant usage d’une fausse qualité :
[voir notamment Cass. com. 5 juil. 1995, pourvoi n°92-40050 : « manque à ses obligations professionnelles l’huissier de justice, commis en sa qualité d’officier ministériel, dans le cadre de l’ordonnance du 2 novembre 1945, pour effectuer des constatations purement matérielles, qui prend une fausse qualité pour obtenir des renseignements d’un interlocuteur ; qu’il en résulte que le procès-verbal de constat qu’il a établi dans ces conditions ne peut être retenu comme preuve »].
La Cour de Cassation interdit également à l’huissier de justice de recourir à des stratagèmes dans le recueil de la preuve :
[voir notamment Cass. com, 18 mars 2008, pourvoi n°06-40852] : « si un constat d’huissier ne constitue pas un procédé clandestin de surveillance nécessitant l’information préalable du salarié, en revanche il est interdit à cet officier ministériel d’avoir recours à un stratagème pour recueillir une preuve ».
Avantageux de leur qualité d’officier ministériel, les huissiers de justice sont donc toutefois restreints dans leurs méthodes de recueil des éléments matériels. L’intervention complémentaire de l’enquêteur de droit privé va alors pouvoir combler ces limites.
La profession, définie par l’article L621-1 du Code la sécurité intérieure, dispose en effet du droit de « recueillir, même sans faire état de sa qualité ni révéler l’objet de sa mission, des informations ou renseignements destinés à des tiers, en vue de la défense de leurs intérêts ».
Si dans le cadre social une jurisprudence constante considère comme illicite et donc irrecevable devant le Conseil de prud’hommes la surveillance du salarié par un enquêteur privé en ce qu’elle porte nécessairement atteinte à sa vie privée, cette surveillance va en revanche permettre à l’huissier de justice d’intervenir en toute légalité.
En d’autres termes, une surveillance du salarié par un détective privé va pouvoir être officieusement mise en place par l’employeur afin de recueillir les éléments nécessaires à la réussite du constat d’huissier ultérieur.
Prenons l’exemple d’un salarié qui ne respecte pas son contrat de travail en s’adonnant à des activités personnelles durant ses déplacements, en temps et heures de travail. Si le rapport d’un détective privé ne va pouvoir servir de preuve licite à l’établissement des faits, son intervention va en revanche permettre à l’employeur de savoir avec précision « quand et où » faire intervenir un huissier de justice en vue de procéder au constat souhaité.
En d’autres cas, et notamment en cas d’agissements constitutifs d’une infraction pénale, les moyens d’établissement de la preuve par le chef d’entreprise sont moins restrictifs.
Le principe de liberté de la preuve en matière pénale permet en effet de justifier diverses méthodes de surveillance en vue de constater la commission du délit.
Prenons ici l’exemple du vol de marchandises par un salarié. Un rapport d’enquête faisant étant de filatures ou de surveillances par infiltration d’un agent extérieur et ayant permis d’établir les faits est recevable devant le Tribunal correctionnel.
L’infraction reconnue par le juge pénal pourra alors constituer une faute au sens du droit social et ainsi permettre la mise en œuvre d’une procédure de licenciement. Retenons cependant que le Conseil des prud’hommes garde l’appréciation souveraine de la faute.
D’autres solutions existent mais il reste primordial que chaque cas soit précisément étudié dans son contexte afin de ne pas risquer une procédure pour licenciement abusif ou atteinte à la vie privée.