Compte tenu de cette difficulté pratique, le Code du travail aménage la charge de la preuve, qui pèse en principe sur le demandeur à l’action, dans un sens plus favorable au salarié ; l’article L. 3171-4 du Code du travail dispose ainsi qu’ « en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles ».
La prescription des heures supplémentaires, actuellement de 5 ans, à partir de la saisine des prud’hommes va passer en juin 2013 à 3 ans avec la mise en œuvre de l’Accord National Interprofessionnel du 11 janvier 2013.
La preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties, le juge forme toutefois sa conviction au vue des éléments suivants.
1) Fourniture par le salarié d’éléments pour étayer sa demande d’heures supplémentaires
Cette formulation, énoncée par la Cour de cassation dans un important arrêt du 25 février 2004 (Soc. 25 févr. 2004, n°01-45.441) signifie que le salarié, qui ne supporte pas pour autant la charge de la preuve, est tenu de produire des éléments sérieux à l’appui de sa demande ; une simple allégation n’est pas suffisante.
En ce sens, un simple relevé manuscrit des heures de travail effectuées par le salarié suffit à étayer sa demande, dès lors que l’employeur ne fournit aucun élément de nature à justifier les horaires réalisés (Soc. 24 nov. 2010, n° 09-40.928).
Il en est de même de la production d’un document récapitulatif dactylographié non circonstancié (Soc. 15 déc. 2010, n°08-45.242).
La preuve peut également être établie par des fiches de présence que le salarié était tenu d’établir à la demande de son employeur (Soc. 10 mai 2000, n°98-40.376).
2) Fourniture par l’employeur d’éléments pour justifier des horaires de travail effectivement réalisés par le salarié
Le juge ne peut, pour rejeter une demande en paiement d’heures supplémentaires, se fonder exclusivement sur l’insuffisance de preuves apportées par le salarié ; il doit examiner les éléments que l’employeur est tenu de lui fournir, de nature à justifier les horaires effectivement réalisés (Soc. 3 juill. 1996, n°93-41.645).
L’employeur ne saurait à ce titre se borner à contester globalement le décompte fourni par le salarié sans en proposer un autre ni fournir aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié (Soc. 14 oct. 1998, n°96-42.440).
De même, le simple affichage des horaires collectifs dans l’entreprise ou les seules mentions des horaires dans le contrat de travail ou les bulletins de salaire sont jugés insuffisants.
En revanche, sont considérés comme des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié les attestations de salariés, anciens ou présents dans l’entreprise, tout comme celles des clients (Soc. 18 juil.2011,n° 99-42.992) ou encore un état circonstancié des heures travaillées par le salarié pendant la période donnant lieu à litige, comprenant les jours de la semaine, les dimanches et les jours fériés (Cass. soc. 18 janvier 2011 n° 09-42.699).
3) Mesures d’instructions éventuelles des prud’hommes
Il appartient au juge d’ordonner, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles :
mesures d’investigation : attestations, déclarations de tiers, enquête, vérifications personnelles du juge ;
constatations par huissier, expertise ;
injonction de communiquer des documents.
Conclusions et conseils pratiques :
Afin de consolider son dossier en cas de contentieux sur le paiement des heures supplémentaires, il est opportun pour le salarié de tenir un décompte quotidien précis (dans un agenda, par exemple) des heures supplémentaires travaillées et de réunir tous autres documents utiles à sa cause tels que des e-mails attestant de son travail effectif pendant ses pauses ou au-delà de son horaire contractuel en fin de journée (mention du jour et de l’heure d’envoi en tête du mail).
Attention : les preuves doivent toutefois être obtenues de manière loyale et licite par le salarié.
Lorsque l’employeur ne rémunère pas partiellement ou en totalité les heures supplémentaires effectuées par le salarié, ce dernier est fondé à demander, outre leur paiement :
les congés payés afférents ;
des dommages-intérêts moratoires (résultant du préjudice lié au retard dans le paiement des heures supplémentaires) ;
la résiliation ou la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Soc. 10 mai 2001, n° 99-43.225) ;
en cas de rupture du contrat de travail, une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé égale à 6 mois de salaire (article L. 8223-1 C. trav.).