En principe, un déclassement doit constater qu’un bien qui appartient à une personne publique (État, établissements publics, collectivités territoriales et groupements de collectivités) n’est plus affecté à un service public, et ce, en vertu de l’article L2141-1 du Code général de la propriété des personnes publiques :
« Un bien d’une personne publique mentionnée à l’article L. 1, qui n’est plus affecté à un service public ou à l’usage direct du public, ne fait plus partie du domaine public à compter de l’intervention de l’acte administratif constatant son déclassement ».
Aussi, selon ce principe, le déclassement n’intervient que pour constater que le bien n’est plus affecté à un service public ou à l’usage direct du public.
Toutefois, l’article L2141-2 du Code prévoit une dérogation à ce principe.
Si les nécessités du service l’exigent, le déclassement peut intervenir de manière anticipée, alors qu’il est encore affecté à un service public ou à l’usage direct du public.
L’administration a alors un délai de trois ans maximum pour déménager les services publics après la cession du bien :
« Par dérogation à l’article L. 2141-1, le déclassement d’un immeuble appartenant au domaine public artificiel de l’État ou de ses établissements publics et affecté à un service public peut être prononcé dès que sa désaffectation a été décidée alors même que les nécessités du service public justifient que cette désaffectation ne prenne effet que dans un délai fixé par l’acte de déclassement. Ce délai ne peut être supérieur à une durée fixée par décret. Cette durée ne peut excéder trois ans. En cas de vente de cet immeuble, l’acte de vente stipule que celle-ci sera résolue de plein droit si la désaffectation n’est pas intervenue dans ce délai ».
Il s’agit du mécanisme de déclassement anticipé, jusqu’alors limité à l’État et à ses établissements publics.
Une proposition de loi votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale, le 28 avril 2016, étend ce mécanisme aux collectivités territoriales et à leurs groupements.
Cela permet évidemment, une gestion plus souple de leur patrimoine comme le relève le rapporteur du texte, la députée Sophie Rohfritsch qui relève une situation paradoxale : « (…) alors que le patrimoine des collectivités territoriales n’a cessé de croître au cours des dernières années, notamment du fait du transfert de certaines compétences auparavant exercées par l’État, les moyens dont elles disposent pour le valoriser sont limités (...) Les collectivités se retrouvent souvent propriétaires de biens immobiliers qui ne répondent plus tout à fait aux besoins des services publics situés dans leurs territoires et qui peuvent représenter des charges importantes, par exemple de mise aux normes en matière d’accessibilité ou de consommation d’énergie. En bonnes gestionnaires, les collectivités pourraient décider de céder ces biens pour financer des rénovations, des acquisitions ou la construction de nouveaux bâtiments, et ainsi mieux répondre aux besoins constatés. Or les règles en vigueur en matière de cessions de biens relevant du domaine public sont très strictes : ces biens ne sont ni aliénables, ni prescriptibles. Par conséquent, pour permettre leur cession, il faut, dans un premier temps, les déclasser, c’est-à-dire les transférer du domaine public au domaine privé. Toutefois, ce déclassement est lui-même conditionné par leur désaffectation au service public. (…) Si cette procédure est protectrice du domaine public, elle peut également conduire à des contentieux et empêcher des cessions justifiées et utiles à la mise en œuvre d’une stratégie patrimoniale ».
Le rapporteur regrette alors que le mécanisme de déclassement anticipé ne concerne que l’État, les établissements publics nationaux et les établissements publics de santé.
Jusqu’à présent, les propositions d’extension de cette faculté aux collectivités territoriales, pourtant soutenues par des acteurs comme l’Association des Maires de France (AMF), l’Assemblée des Départements de France (ADF) et dans une certaine mesure la Cour des Comptes, n’avaient pas abouties au regard du risque encouru par les collectivités dans le cas où les biens cédés ne seraient pas désaffectés dans le délai imparti. La vente serait alors nulle et la collectivité contrainte de rembourser.
C’est pourquoi deux amendements ont été déposés. L’un prévoyant que l’acte de vente devra, à peine de nullité, comporter une clause organisant les conséquences de la résolution de la vente. Les pénalités de retard ainsi inscrites devront faire l’objet d’une provision. Le second prévoit que le recours à cette opération donnera lieu à une délibération motivée de l’assemblée délibérante de la collectivité propriétaire du bien, sur la base d’une étude d’impact pluriannuelle tenant compte de l’aléa.
Cette proposition de loi a été adoptée à l’unanimité.