Une show manager du Crazy Horse obtient aux prud’hommes le paiement d’heures supplémentaires et une indemnité pour travail dissimulé.

Par jugement du 10 novembre 2016, le Conseil de prud’hommes de Paris (départage) a condamné la société Crazy Entertainment (qui exploite le Crazy Horse) à payer à une show manager 20.000 euros pour heures supplémentaires avec les congés payés afférents, 2.000 euros pour non-respect du repos hebdomadaire et 21.315 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé.
(CPH Paris Départage 10 nov. 2016)

1) Sur les heures supplémentaires

La juge départiteur a particulièrement motivé sa décision.

Elle rappelle qu’aux termes de l’article L. 3243-3 du Code du travail, l’acceptation sans protestation ni réserve d’un bulletin de paie par le travailleur ne peut valoir de sa part renonciation au paiement de tout ou partie du salaire et des indemnités ou accessoires de salaire qui lui sont dus en application de la loi, du règlement, d’une convention ou d’un accord collectif de travail ou d’un contrat.

Il appartient au salarié de produire au préalable des éléments de nature à étayer sérieusement sa demande.

Madame X affirme avoir effectué de nombreuses heures supplémentaires lors de son affectation comme local show manager à Las Vegas et lors de son affectation comme show manager à Paris.

1.1) Un décompte des horaires, des relevés de pointage et plusieurs attestations

A l’appui de ses dires, elle verse aux débats :
- Des décomptes manuscrits de ses horaires, qu’elle explique avoir elle-même effectués et qui semblent se rapporter allant d’octobre 2007 à février 2009, soit la période de détachement à Las Vegas ;
- Des relevés de pointage pour la période allant de mars 2009 à août 2013 ;
- Une attestation de Madame P, danseuse au Crazy Horse, depuis décembre 2010 qui atteste « j’ai été témoin de la charge énorme de travail qui incombait aux 2 show managers. Leurs journées étaient telles qu’elles n’avaient jamais le temps de prendre une pause et qu’elles cumulaient toutes les semaines des heures supplémentaires pour assurer la totalité de leurs taches ; la direction profitant du caractère dévoué de Madame X et de sa collègue » ;
- Une attestation de Madame M qui explique qu’à Las Vegas « il n’y avait qu’un seul jour de congé par semaine » et qu’à Paris, Madame X « travaillait beaucoup avec des horaires trop flexibles qui comme elle me l’avait dit n’aurait pas donné lieu au paiement d’heures supplémentaires » ;
- Une attestation de Madame A « J’ai été affectée au spectacle de Las Vegas en tant que danseuse nue sous la responsabilité de Madame X qui occupait le poste d’assistante show manager. Durant cette période, j’ai pu constater que Madame X travaillait systématiquement 6 jours par semaine au lieu de 5 et parfois même plus, de 7 jours d’affilés. Ceci était dû à la quantité trop importante qui était à la charge. Ses journées dépassaient aussi souvent les 8 heures, commençant parfois vers 14 heures pour finir au-delà de minuit… » ;
- Une attestation de Madame E « … Madame X était donc présente tous les jours d’ouverture et également lors des répétitions hebdomadaires. Par ailleurs, il arrivait que nous travaillions 7 jours sur 7 lorsqu’un gala ou une promotion était programmée le jour de repos » ;
- Une attestation de Madame C., danseuse show manager, qui confirme s’agissant du poste occupé par la demanderesse à Las Vegas que « la charge de travail était telle qu’elle travaillait systématiquement à 6 jours par semaine au lieu de 5, accomplissant ainsi de très nombreuses heures supplémentaires » ;
- Un courriel du 7 février 2012, adressé par la demanderesse, qui indique notamment « Aussi déjà discuté avec O lors du dernier RDV la semaine passée, il faudra essayer de trouver quelqu’un pour être présent/surveiller le show pour le dimanche 12 février (matinée + show) et aussi pour samedi 18 et dimanche 19 février, puisque S et moi, on risque de n’avoir aucun jour off dans la semaine ».

1.2) Des relevés produits par l’employeur qui « ne peuvent apparaitre que comme fictifs »

La société conteste la réalité de ces heures supplémentaires et produit les courriels adressés par la salariée de juin 2012 à juillet 2013, mentionnant tous 151,67 heures mensuelles de travail. Elle explique que la salariée transmettait chaque mois à la comptabilité les renseignements sur les éventuelles heures supplémentaires accomplies par elle-même ou les danseuses et que Madame X n’a déclaré aucune heure supplémentaire la concernant.

Cependant, Madame X explique que ces relevés ne correspondaient pas à la réalité et en apporte pour preuve une attestation de Madame A qui explique qu’il était demandé « aux show managers de remplir systématiquement leur propre tableau de paie avec 151 heures par mois et de le transmettre ainsi à la comptabilité alors qu’en réalité le travail de show manager impliquait régulièrement des heures supplémentaires ».

Ces allégations sont confirmées par le fait que la salariée a mentionné exactement 151,67 de travail par mois sans aucune variation quels que soient le nombre de jours dans le mois et le nombre de jours de congés payés. Dès lors, ces relevés ne peuvent qu’apparaitre comme fictifs.

La société souligne par ailleurs que ces relevés de pointage ne prennent pas en compte les temps de pause et ne concernent pas les périodes de déplacements.

Si ces relevés sont effectivement incomplets, ils permettent de déterminer sans contestation possible les jours travaillées par la salariée et indiquent pour la plupart une heure d’entrée ainsi qu’une heure de sortie.

Dès lors, au vu de ces développements, il convient de considérer comme établi le fait que Madame X a effectué des heures supplémentaires qui n’ont donné lieu à aucune rémunération sur la période non prescrite allant du 21 mai 2008 à la date de rupture du contrat.

Le Conseil en évalue souverainement l’importance et fixe en conséquence les créances salariales s’y rapportant en fonction des éléments de faits qui lui sont soumis.
La société est condamnée à payer 20.000 euros de rappel d’heures supplémentaires et de 2.000 euros de congés payés afférents.

2) Sur le repos hebdomadaire

Le contrat de travail stipule que Madame X travaillera 35 heures par semaine avec 2 jours de repos hebdomadaires consécutifs ou non consécutifs selon les contraintes de planning.

Or il ressort des pièces précédemment citées que ce repos n’était pas toujours accordé à la salariée notamment lors de son emploi à Las Vegas.

La salariée obtient 2.000 euros pour non-respect du repos hebdomadaire.

3) Sur le travail dissimulé

Les bulletins de paie de Madame X mentionnent un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli et que l’employeur ne pouvait ignorer ce fait.

Madame X est fondée à obtenir le paiement d’une indemnité égale à 6 mois de salaire, soit 21.315 euros.

La salariée est déboutée de demande de dommages intérêts pour harcèlement moral, de requalification de la prise d’acte en licenciement sans cause et rappel de salaire sur une requalification des fonctions.

Les parties peuvent interjeter appel du jugement dans un délai d’un mois.

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