Il est intéressant de constater que la protection jusqu’à présent accordée aux marques « mode luxe » en classes 18 (sacs, maroquinerie...) 25 (vêtements, chaussures...) n’est plus fixiste mais se comprend différemment, sans doute pas encore pour le riche profane mais davantage pour le nouveau riche.
Ainsi, l’approche juridique des libellés de produits et services servant d’assise à l’obtention d’un certificat d’enregistrement d’une marque s’entend sous une rédaction nouvelle, plus stylisée que les vieilles méthodes de rédaction.
A titre d’exemple la marque « Gucci » lancée en 1921 a fait de sa traditionnelle liste visée au dépôt de ses marques, un libellé évolutionniste sinon révolutionnaire.
Qui se lit aujourd’hui avec un regard tourné vers l’immatériel, en dépit de prix surréalistes.
La disruption juridique se lit ainsi à l’occasion des derniers dépôts de marques de la maison italienne.
Classe 9 : Produits virtuels téléchargeables à savoir programmes informatiques proposant les produits suivants : vêtements, articles chaussants, ceintures, chapellerie, sacs, (….).
Produits virtuels téléchargeables, à savoir Programmes informatiques contenant des dessins et personnages numériques animés et non animés, des avatars, des revêtements et habillages numériques, tous étant destinés à des environnements virtuels en ligne et à des environnements virtuels de réalité étendue, y compris à des jeux en ligne, tous étant également authentifiés par des jetons non fongibles (…).
Classe 35 : (..) Tous les produits précités étant destinés à des environnements virtuels en ligne, y compris à des jeux en ligne, étant également authentifiés par des jetons non fongibles (JNF).
Classe : 36 Services financiers, à savoir, fourniture d’une devise virtuelle utilisée par un membre d’une communauté en ligne par le biais d’un réseau informatique mondial (..).
Classe : 41 Services de divertissement à savoir, Fourniture des produits virtuels en ligne non téléchargeables suivants : vêtements, articles de chaussures (…) [1]
Il semblerait que l’héritage Chanel n’ait pas encore décidé de faire de son monde une bascule dans le virtuel.
Aucune protection de leur marque n’ayant été à ce jour constatée, sous un libellé « NFT », rajeuni.
Certes, toutes les marques ne pouvant être « Deux fois plus crocodile » à l’instar de Lacoste.
Pour certaines marques comme « Rimowa » le voyage dans le virtuel aura été chanceux.
Le projet qui portait sur une collaboration avec la marque immatérielle « RTFKT » de Nike, verra naitre une ligne de bagages essentiellement « cabine » - sous une forme numérique et mais aussi physique, en édition limitée produite à 888 exemplaires, le chiffre 8 symbole de l’infini…
Cette initiative a connu l’envol espéré. Il était prudent de lancer dans un premier temps une valise « cabine » plutôt que d’envisager immédiatement - avec excès de confiance - une valise long courrier.
A son lancement, le succès a été au rendez-vous.
Les valises n’ont pas été abandonnées sur le tapis roulant, les propriétaires ayant été assez nombreux.
En revanche, sortie de route pour « Porsche » qui avait lancé une collection de NFT avec ses modèles de voitures.
Traditionnellement, les marques de luxe sont les plus exposées à la contrefaçon. Et, il en est de même sur le metavers.
La reprise ou création d’un modèle et l’utilisation sans accord de la marque, d’un NFT constitue indiscutablement un acte de contrefaçon.
Est-ce que le talent d’un Ora Ito exercé sous ce nouvel modèle économique aurait eu le même impact qu’à la fin des années 90 ?
Il semblerait que non.
L’artiste numérique M. Rothschild a été poursuivi par la Maison Hermès pour contrefaçon.
Elle lui reprochait d’avoir créé des NFT qui étaient des copies de sacs « Birkin », sous le néologisme « Metabirkin ».
Les « Birkin » sont beaux, dotés d’une fulgurance incontestable, le nom de leur copie NFT beaucoup moins... Désolé Jane.
L’artiste prétendait que son intention restait « artistique » mais définitivement condamnable suivant le point de vue de la loi américaine, dans une décision rendue très récemment.
Il s’agissait du premier procès lié à la reproduction sous NFT - et sans autorisation de son propriétaire - d’un vieux mais intemporel modèle.
Nous le savons, Hermès, de son aspect divin est un personnage malin, rusé, et séduisant.
Ecartons tout oxymore.
La Maison de luxe aura défié avec succès l’effronterie licencieuse de l’artiste Rothschild.
Avec cette décision de la Cour de l’Etat de New York et qui sera très probablement identique à celles des tribunaux français, les copieurs seront condamnés aux enfers.