Aux termes de l’article L. 2141-2 du Code de la santé publique :
« L’assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l’infertilité d’un couple ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité. Le caractère pathologique de l’infertilité doit être médicalement diagnostiqué.
L’homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l’insémination. Font obstacle à l’insémination ou au transfert des embryons le décès d’un des membres du couple, le dépôt d’une requête en divorce ou en séparation de corps ou la cessation de la communauté de vie, ainsi que la révocation par écrit du consentement par l’homme ou la femme auprès du médecin chargé de mettre en oeuvre l’assistance médicale à la procréation. »
La loi ne fixe donc pas d’âge limite précis pour bénéficier d’une PMA.
Néanmoins, en juin 2016, l’Agence de Biomédecine a refusé le transfert vers l’étranger de gamètes d’hommes de 68 et 69 ans.
Le 14 février 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé les décisions de l’Agence de Biomédecine ayant refusé ces transferts.
L’Agence de Biomédecine a relevé appel.
Par deux arrêts du 5 mars 2018, la Cour d’appel de Versailles a donné raison à l’Agence de Biomédecine en annulant les jugements du Tribunal administratif de Montreuil.
Tout d’abord, la Cour d’appel fixe à 59 ans l’« âge de procréer » énoncé par l’article L. 2141-2 du Code de la santé publique. Pour ce faire, elle se base sur les travaux préparatoires de la première loi de Bioéthique de 1994, en indiquant que le législateur, par l’utilisation de cette notion, a entendu préserver :
L’intérêt de l’enfant à naître, « afin que celui-ci ne soit pas exposé à certains risques pour sa santé » ; il est donc ici question uniquement de l’intérêt médical et non de l’intérêt « social » de l’enfant à naître.
L’intérêt de la femme, « les techniques de stimulations ovariennes étant éprouvantes et non sans risque pour sa santé ».
L’intérêt de la société, « eu égard au coût élevé mis à la charge des caisses de sécurité sociale lorsqu’il est fait usage de cette technique ».
La Cour d’appel en conclut que "l’âge de procréer "doit être entendu comme étant celui au cours duquel les capacités procréatives de l’homme et de la femme ne sont pas altérées par le vieillissement.
Sur la base de différentes études médicales et de l’avis de la Commission nationale de médecine et de biologie de la reproduction de juillet 2004, la Cour d’appel a considéré que :
« Un homme peut être regardé comme étant "en âge de procréer", au sens de l’article L. 2141-2 du code de la santé publique, jusqu’à un âge d’environ 59 ans, au-delà duquel les capacités procréatives de l’homme sont généralement altérées ; »
Néanmoins, par l’utilisation du terme « environ », la Cour d’appel a laissé la porte ouverte à l’appréciation de la situation particulière du demandeur.
A ce titre, au-delà des dispositions législatives, le demandeur peut invoquer la Convention Européenne des Droits de l’Hommes pour faire respecter ses libertés fondamentales.
En l’espèce, les demandeurs avaient tous deux soutenu que les décisions de l’Agence de Biomédecine bafouaient leur droit au respect de la vie privée et familiale (article 8).
Dans les deux arrêts, la Cour d’appel a balayé l’argumentaire des demandeurs en estimant que l’atteinte leurs droits fondamentaux n’était pas disproportionnée dans la mesure où le projet parental était récent.
Dans les deux cas, les projets parentaux dataient de moins de deux ans.
On peut donc légitimement s’interroger sur la position de la Cour si le projet parental avait été de quatre à cinq ans, et ce, quel que soit l’âge du requérant.
L’âge du demandeur ne doit donc pas être considéré comme le seul critère à prendre en compte pour décider de l’accès ou non à la PMA.
Le projet parental reste au cœur du débat.
Discussion en cours :
Merci pour cet article qui nous éclaire sur les critères retenus par les juges !