En octobre 2021, le Dalloz annonçait que conformément à la loi de programmation 2018-2022 et la Réforme de la Justice, les apostilles et les légalisations seraient réalisées par les Notaires à partir de 2023 [1].
En décembre 2021, le site Lextenso croyait que la mise en place de la réforme des apostilles et des légalisations serait effective en septembre 2023 [2].
En juin 2023, le site notaire.fr pronostiquait que ce serait pour le 1er janvier 2025 [3].
Nous sommes en janvier 2025 et rien n’a démarré.
Rappelons brièvement de quoi il s’agit. L’échange de documents entre pays nécessite des mesures particulières pour limiter les fraudes [4]. Il existe une convention internationale, dite Convention de La Haye, qui définit un certificat standard appelé "apostille" entre les pays signataires. Cette apostille est délivrée par les Cours d’Appel. Et si le pays destinataire n’est pas signataire de cette convention, on opte pour une "légalisation" en deux étapes : le Ministère des Affaires Étrangères [5], puis le Consulat du pays concerné [6].
Et donc vers 2018, le Ministère de la Justice a décidé - dans un but d’économie - de transférer cette activité au secteur notarial. On peut tout de suite noter que cette notion "d’économie" est virtuelle. Le projet revenant à transformer un service public gratuit - donc financé par l’impôt - en service privé payant, mais sans diminution d’impôt bien évidemment.
Les organisations notariales se sont déclarées intéressées, pour autant qu’on leur donne les moyens d’effectuer cette mission, avec notamment la mise en place d’une base de donnée nationale des signatures de légalisation [7], prévue par une ordonnance du 4 mars 2020, afin de pouvoir contrôler les légalisations de signature. Sous projet dont l’état d’avancement est inconnu.
Un décret au Conseil d’État devait fixer les tarifs des nouvelles procédures, il n’a toujours pas été pris.
Enfin, une question assez fondamentale me démange depuis cinq ou six ans : en admettant que le projet aboutisse un jour, les pays étrangers sont-ils d’accord avec la dématérialisation prévue ? Car si on demande une apostille ou une légalisation [8], c’est pour satisfaire à une exigence de l’administration d’un pays étranger. À ce jour cela fonctionne : on échange certes des papiers physiques, mais des papiers qui sont acceptés à Rio comme à Stockholm, à Honolulu comme à Pékin. Je n’ai jamais trouvé auprès de quelles instances internationales [9] les idées françaises avaient été présentées et validées avant d’être mises en projet ? [10]
Il y a plus d’un an, j’ai vu plusieurs sites notariaux mis à jour pour présenter le "nouveau service Apostilles", leurs propriétaires doivent regretter leur empressement.
Je connais des employés de Cour d’Appel - service "Apostilles" - qui attendent la fermeture de leur service et leur mutation depuis plus de 5 ans.
La situation présente est tellement floue [11] qu’il est bien difficile de conclure. Les commentaires sont ouverts et peut être que des informations vont en émerger ?
Discussions en cours :
Il s’est bien passé quelque chose en fin d’année 2024. Le 23 décembre a été pris le décret 2024-1200 qui vient modifier la date de démarrage de l’apostille notariée : la date du 1er janvier 2025 est remplacée par ... " une date fixée par arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre de l’Europe et des affaires étrangères et au plus tard le 1er septembre 2025" !
On se donne rdv en septembre pour faire le point sur le prochain report ?!
Merci de cet article pragmatique et intéressant. Traductrice assermentée en langue arménienne, mes clients sont plus que concernés par les apostilles, car j’effectue de 2 à 5 apostilles par mois. Votre article fait un aperçu très intéressant concernant l’illusion d’une économie à faire en transformant un service public, financé par le contribuable en service payant, sans diminution d’impôt en contrepartie. Nos clients qui vont payer ce service d’apostille, sont majoritairement imposables en France. Ainsi ce mécanisme imposerait une charge financière redondante...
Apostilles et légalisations ne concernent pas strictement les traductions assermentées, mais l’ensemble des documents qu’on est susceptible d’envoyer officiellement dans un pays étranger.
Mais, dans l’immense majorité des cas, on transmet le document dans la langue du pays de destination, au moyen d’une traduction assermentée préalable.
Sauf si, bien sûr, on s’adresse à un pays francophone (pays africains, Québec, Belgique, Suisse,...)