Agents Publics, CDD, CDI et Allocations chômage.

Par Perrine Athon-Perez, Avocat

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Explorer : # agents publics # contrats à durée déterminée (cdd) # contrats à durée indéterminée (cdi) # allocations chômage

Le point sur les droits de l’agent contractuel arrivant au terme de son contrat à durée déterminée. Dans la fonction publique, le recours aux agents contractuels doit rester exceptionnel. En effet, le principe doit demeurer celui de l’occupation des emplois permanents par des fonctionnaires. Pour éviter un recours abusif aux agents contractuels par l’administration, la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 rappelle et clarifie les conditions dans lesquelles ce recrutement peut intervenir.

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1. La limite des six années de contrats à durée déterminée (CDD)

Sous réserve de conditions de fond énumérées par des textes spécifiques, lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, cette durée est au maximum de trois ans. Ce contrat est renouvelable par reconduction expresse dans la limite d’une durée maximale de six ans. Au delà, si un renouvellement est envisagé, il ne pourra en principe l’être que pour une durée indéterminée et par décision expresse.

Il est intéressant d’observer que la loi du 12 mars 2012 assouplit les modalités de calcul de l’ancienneté en admettant la prise en compte de services accomplis de manière discontinue sous réserve que la durée des interruptions n’excède pas quatre mois.

Dès lors, l’administration dispose d’une alternative : soit elle renouvelle expressément l’engagement de son agent par un contrat à durée indéterminée, soit elle ne le renouvelle pas.

Cette circonstance emporte deux conséquences.

2. L’absence de droit à un contrat à durée indéterminée (CDI)

D’abord, en ce qu’un agent contractuel ne bénéficie d’aucun droit à se voir offrir un CDI.

En effet, l’administration dispose d’une faculté de pérenniser la collaboration, et peut parfaitement décider de ne pas reconduire le contrat.

La loi se borne à poser la règle selon laquelle si, au-delà du délai maximal de six ans, l’administration décide de renouveler l’engagement, ce renouvèlement ne pourra intervenir que par le biais d’un contrat à durée indéterminée.

3. L’absence de droit à la requalification du CDD illégal en CDI

Ensuite, et c’est certainement le point le plus intéressant de ce système en pratique, aucun droit à la requalification en contrat à durée indéterminée n’existe en droit de la fonction publique contrairement au droit du travail.

La loi n°2012-347 du 12 mars 2012 n’y a rien changé.

Prenons l‘hypothèse dans laquelle le contrat conclu avec l’administration serait tacitement renouvelé, soit par le maintien de fait de l’agent en fonction au terme de son contrat, soit par l’application d’une clause de tacite reconduction irrégulièrement incluse dans le contrat.

En droit de la fonction publique, la règle posée est celle de la reconduction expresse.

Dès lors, un contrat conclu sous la forme d’un contrat à durée déterminée ne pourra nullement se voir conférer une durée indéterminée au seul motif qu’il ne respecte pas le seuil légal de six ans. Et cela, même par le biais d’une action devant le juge administratif.

Le renouvellement de fait d’un contrat à durée déterminée n’aura pour seule conséquence la conclusion d’un nouveau contrat de même durée.

L’administration se trouve alors dans une position de force, et ce, à double titre.

4. Les conséquences du refus de signer un nouveau CDD sur l’assurance chômage

En effet, non seulement, aucun texte ne lui impose de renouveler le contrat d’un agent mais en outre, le refus de l’agent de renouveler son engagement sous la forme d’un contrat à durée déterminée emporte des conséquences importantes sur son indemnisation au titre du chômage.

Les allocations chômage étant payées par l’administration dont relève l’agent, son refus de signer un nouveau contrat à durée déterminée sera sans nul doute analysé comme une démission de la part de l’employeur public.

L’indemnisation du chômage est possible lorsque les agents sont involontairement privés d’emploi. Il est de jurisprudence constante que le chômage est involontaire quand la perte d’emploi n’est pas du fait de l’agent. Dans cette perspective, la démission n’ouvre, en principe, pas de droit à indemnisation puisqu’elle constitue un départ volontaire.

Ainsi, lorsque l’agent refuse le renouvellement de son contrat, le juge administratif a-t-il estimé que l’employeur public pouvait refuser de l’indemniser au titre du chômage.

Toutefois, afin d’apporter un minimum de protection à l’agent, le juge administratif admet que l’intéressé puisse prétendre à une indemnisation lorsque sa démission présente un motif légitime, qui peut notamment résulter de « considérations d’ordre personnel ou au fait que le contrat a été modifié de façon substantielle sans justification de l’employeur » (CE, 13 janvier 2003, n° 229251). Dans de telles circonstances, la Haute juridiction assimile la démission à une perte involontaire d’emploi ouvrant droit à indemnisation.

En définitive, l’agent qui, au terme de six années d’engagement à durée déterminée, se voit offrir par son administration un nouveau CDD, ne peut pas lui imposer la conclusion d’un CDI. En outre, s’il refuse de signer pour un peu plus de précarité, il risque de perdre son droit à percevoir des allocations chômage pendant qu’il cherche un nouvel engagement.

La limitation de la succession des CDD est certes une mesure visant à limiter la précarité de l’emploi dans la fonction publique. Mais, en pratique, on se rend bien compte qu’elle ne confère pas aux contractuels publics les mêmes garanties que celles des salariés du secteur privé qui, en plusieurs hypothèses, bénéficient du droit à la requalification du contrat en CDI. C’est pourtant cette menace de la requalification qui porte le vrai pouvoir dissuasif à l’égard des employeurs.

Il n’en demeure pas moins que la question du renouvellement sous la forme d’un contrat à durée indéterminée est relativement récente. Même si les agents publics ne disposent pas d’un droit à obtenir un contrat à durée indéterminée, le juge administratif tend à examiner les conditions dans lesquelles l’administration décide de ne pas renouveler leur engagement.

Ainsi, par exemple le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise jugea en 2011 qu’au vu des circonstances de l’espèce, la requérante avait « vocation à bénéficier d’un contrat à durée indéterminée après six années continues de fonctions » (Ordonnance du Tribunal administratif de Cergy Pontoise, 29 août 2011, n° 1106712). On peut ainsi espérer que cette décision d’espèce annonce un régime davantage protecteur pour les agents.

La loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 vient, en partie, combler cette attente en obligeant l’administration à proposer de transformer en CDI les CDD des agents non-titulaires qui remplissent certaines conditions à la date de publication de la loi. Ce faisant, elle renforce la place du CDI au sein des trois fonctions publiques.

Sous réserve de quelques exclusions, l’agent contractuel qui aura accompli auprès du même employeur public une durée de services effectifs au moins égale à six années au cours des huit années précédant la publication de la loi, devra pouvoir bénéficier de ce régime législatif. Pour ceux âgés d’au moins 55 ans au 13 mars 2012, ils devront justifier de trois années de services effectifs accomplies au cours des quatre dernières années.

Toutefois, il est à noter que ce contrat pourra prévoir la modification des fonctions de l’agent, sous réserve qu’il s’agisse de fonctions du même niveau de responsabilités. En cas de refus, l’agent restera régi par les stipulations du contrat en cours.

Me Perrine ATHON-PEREZ
Avocate à la Cour
Cabinet ATHON-PEREZ
contact chez padp.fr
www.athon-perez-avocat.com

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Discussions en cours :

  • Merci pour cet article. Cette excellente information.

    Voici ma question : Quand dans une administration territoriale ( mairie) une personne reçoit un contrat stipulant : "pour la durée de l absence de Mme X" sans aucune precision concernant la durée que se passe- t- il si a la fin de son absence pour suivre son conjoint hors de France Mme X donne sa démission et ne revient pas .

    Quels sont les droits a maintien dans le poste pour la personne qui a été recrutée pendant son absence ?

    Dans le cas ou il n y aurait aucun droit :
    Sachant que le contrat initial ne comporte pas de durée et que la personne ne connait pas les dates de disponibilité de Mme X Comment l administration
    doit elle informer la personne que son contrat est terminé ?

    • par Fabien , Le 6 septembre 2014 à 16:21

      Bonjour

      je travaille à l’hôpital en tant que sage femme. Mon contrat se termine prochainement. On me propose un nouveau contrat pour travailler sur un autre statut (puéricultrice) sur 2 mois payé comme une sage femme puis reprise du statut sur 3 mois de sage femme. Je ne sais pas si cela sera sur deux contrats distincts. J’ai decidé d aller jusqu au bout de mon contrat actuel et de ne pas prendre ce que l’on me propose. Aurais je le droit aux allocations chômage ?

      sinceres remerciements pour votre reponse

    • par merroun , Le 10 février 2016 à 14:47

      Mon contract CDD du particien contractuel arrive a son terme en juillet 2016 apres 6 ans d’activite sur le meme poste. Pas de renouvellement dans les memes conditions ?
      reclamer un CDI ? negociation prevue dans les jours proch. Mer ci pour vos conseils.

    • par LEGERON , Le 26 août 2016 à 17:31

      Bonjour,

      Je suis actuellement sur un poste d’A.H.U (assistant hospitalo-universitaire- deux employeurs l’hôpital et l’université qui est l’employeur principal).
      J’ai été nommée pour une durée de 2 ans (conformément à la législation pour ce type de statut) puis renouvelée pour un an ( le régime A.H.U prévoit une nomination pour 2 ans puis renouvelable deux fois 1 an).

      J’arrive à la fin de ma troisième année (1 er renouvellement) et je sais que je ne bénéficierai pas d’un second renouvellement pour une année supplémentaire.

      Mon chef de service voudrait me proposer un contrat de vacataire (je ne sais pas encore la quotité horaire) mais ce nouveau statut ne m’intéresse pas ni en terme de salaire (perte significative) ni en terme de perspective de carrière.

      Si je refuse de signer ce nouveau contrat suite à le fin de mon CDD d’A.H.U (nouveau statut ; salaire différent) aurai-je le droit à l’allocation chômage ?

      Merci pour vos réponse !!!!

  • bonjours,
    ma femme, et rentrée dans la fonction publique en 2007 ou début 2008 .Elle été au pole ménage après prés d’un an elle a pris un poste de fessant fonction (amp),en 2012 elle à comme l’établissement qui l’employer ne voulais pas lui financée sa formation(les caisse sont vide) elle ces fait financer celle ci par la région. (le coup financier au vue de la perte de revenus à été pour nous énorme) elle été pendent prés d’un an indemnisée par pole emploi. Elle à obtenu son diplôme d’ A,M,P et réintégré cette établissement avec le statu d’amp mais toujours en ccd nous venons d’apprendre que sont cdd ne serrais pas renouveler.(nouveaux directeur et donc nouvelle politique).
    en résumer de 2007 au 31/12/2015.que des cdd sens interruption (sauf formation d’une année).
    Et le 01/01/2016. pole emplois je suis dépitée.
    mois j’ai été licencier économique il y a 6 mois tous va bien !!!

    • par marie , Le 24 juillet 2016 à 22:14

      Bonjour je suis contractuelle depuit 1ans dans la fonction public jai besoin dun congé sans solde puije partir 1mois et demander a signer mon contrat a mon retour ?

  • par blanc charline , Le 4 juillet 2016 à 13:08

    Bonjour,

    je suis actuellement AESH en cdd pour un contrat de 39h semaine. C’est mon deuxième cdd d’un an, il se termine le 31 août de cette année.
    Je viens d’avoir le rectorat au téléphone pour savoir comment cela se passait s’il me proposait un contrat pour la prochaine rentrée scolaire, mais que le nombre d’heures est inférieur à l’actuel. La réponse est refus de contrat, donc aucun droit à l’allocation chômage par la suite.
    Cela me pose tout de même question, puisque le contrat sera différent de l’actuel.
    De plus je suis enceinte, et en congé maternité à partir du 5 septembre. Mon projet était donc de ne pas renouveler mon contrat, dans le but de trouver un nouvel emploi dès la fin de mon congé en janvier. Seulement, sans allocation chômage d’assurée cela me semble compliqué, mais il me semble aussi très difficile de trouver un emploi si je signe un nouveau cdd aesh.

    Que faire ? N’aurai-je vraiment aucun droit à l’ARE ?
    Merci

  • par Barbaray , Le 1er juin 2016 à 12:21

    Bonjour,

    Je me permets de vous solliciter car je m’interroge sur mes droits. Je suis sage-femme en CDD depuis avril 2011 dans un hôpital publique. Mon contrat cours jusqu’au 31 décembre 2016 mais je viens de recevoir un contrat CDI.
    Je ne souhaite pas accepter car des postes de titulaires ( j’étais la prochaine ) sont à pourvoir. Par ailleurs j’ai obtenu un diplôme d’acupuncture que je me suis auto financé et des consultations vont être ouverte sans valorisation pour moi.

    Je m’inquiète car je vois pleins d’information différentes sur les droit. Tout d’abord l’hôpital me émanée un courrier expliquant mon refus de ce contrat.
    Si mon cdd se termine en decembre aurais je une ouverture de droit au chômage ? Sachant que c’est l’établissement qui verse les allocations et qu’ils essaye vraiment de grappiller. En ne donnant pas suite suis je démissionnaire et donc non éligible au chômage ?

    Merci d’avance de votre réponse

    Gwen

  • par Loum papa , Le 1er mars 2016 à 11:35

    Bonjour, je vous explique mon cas afin d’avoir vos conseils.
    Suite à un recrutement au sein du Ministères des Finances pour un poste en catégorie B " n’existant pas de corps de fonctionnaire (article 4-1° loi n°84-16 , CDD de 3 ans renouvelable dans la limite de 6ans puis CDI ) en remplacement d’un poste vacant cause mutation de l’ancien contractuel qui est en CDI ".
    Ma candidature suite aux différents entretiens a été accepté et lors de ma 1 ère journée au cours de la signature du contrat, ma surprise a été de découvrir un contrat proposé différent.
    En effet sur la base " d’un Pourvoi temporaire d’une vacance d’emploi ( article 6 quinquies ,CDD conclu pour la durée de la vacance prévisionnelle pour palier à l’absence du titulaire dans la limite d’un an renouvelable dans la limite de 2 ans ) ".
    Alors que le poste occupé depuis le 12 janvier 2015 en tant " qu’Assistant Technique de Maintenance et d’Exploitation cat. B " est un poste à besoin permanent à temps complet (Mutation du titulaire ) qu’il n’existe pas de corps de fonctionnaires (poste publié avant le 1er recrutement et lors du renouvellement du contrat 12 semaines minimum et aucun candidat fonctionnaire avec compétences adéquates et recherchés n’y a postulé ) .
    Durant mon recrutement j’ai refusé un CDI auprès de mon ancien employeur afin d’accepter la proposition d’embauche du Ministère des Finances qui était un CDD de 3 ans renouvelable dans la limite de 6 ans puis CDI.
    Le jour de la signature du contrat prévu le jour de mes débuts au sein du ministère le contrat a donc été modifié en CDD conclu pour la durée de la vacance prévisionnelle pour palier à l’absence du titulaire dans la limite d’un an renouvelable dans la limite de 2 ans.
    Ayant démissionné et n’ayant plus d’emploi au jour de la signature du contrat je n’ai eu d’autre choix vu le refus des représentants de l’administration de modifier le contrat comme énoncé durant la procédure de recrutement que de signé afin d’occuper un emploi et de ne pas me retrouver au chômage.
    De par ma signature j’acceptai une précarité forcé n’ayant plus d’éventuel promesses d’embauche en CDI.
    Je précise être Français d’origine d’Afrique de l’ouest.
    Le poste que j’occupe me plais, du faite du renouvellement de mon CDD et de la recherche de par mon supérieure de toute solution pouvant lui faire me conserver et me titulariser me fait prendre la démarche de vous contacter.
    Alors à moins d’un an de la fin de mon contrat donc CDD renouveler 1 fois et de ma crainte qu’a la fin de ce CDD je n’ai plus d’emploi me fait vous demander si il y a un litige durant mon recrutement ? et surtout vis a vis du contrat "forcé à signer" ?
    Et quelle serait la meilleure solutions à mon cas ?
    merci d’avance pour vos conseils.
    cordialement,

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