I. Faits.
En l’espèce, après un arrêt maladie prononcé en novembre 2013, une salariée reprend son travail en mi-temps thérapeutique le 4 avril 2014.
Il est alors convenu, par avenant à son contrat de travail, d’une rémunération mensuelle brute de 7 000 euros correspondant à 50% d’un salaire à temps plein.
Licenciée pour faute grave le 4 novembre 2019, la salariée a saisi la juridiction prud’homale le 25 novembre 2019 afin de contester son licenciement et solliciter le paiement de diverses sommes salariales et indemnitaires.
Dans un arrêt rendu le 26 janvier 2023, la Cour d’appel de Versailles, accède en partie à la demande de la salariée en reconnaissant le caractère sans cause réelle et sérieuse du licenciement.
Toutefois, cette dernière se pourvoit en cassation.
II. Moyens.
La salariée plaidait notamment que :
- enfin, le mi-temps thérapeutique est un temps partiel imposé par le médecin de travail au regard de l’état de santé de la salariée donc il conviendrait de prendre en compte, selon la formule la plus avantageuse, pour le calcul de l’indemnité de licenciement, le salaire des douze ou trois derniers mois qui précèdent le mi-temps thérapeutique au risque de créer une situation discriminante pour la salariée.
III. Solution.
Au visa des articles L1132-1 du Code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause, et les articles L1234-5, L1235-3, L1234-9 et R1234-4 du même code, aucune personne ne peut être licenciée ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L3221-3, en raison notamment de son état de santé.
Selon l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement notamment de son état de santé, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne l’aura été dans une situation comparable et constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d’entraîner, pour l’un de ces motifs, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés.
Selon l’article L1234-5 du Code du travail, le salarié, qui n’exécute pas son préavis, a droit, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.
Selon l’article L1235-3 du Code du travail, si le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux exprimés en mois de salaire brut.
Selon les articles L1234-9 et R1234-4 du Code du travail, le salaire à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :
1° Soit la moyenne mensuelle des douze derniers mois précédant le licenciement, ou lorsque la durée de service du salarié est inférieure à douze mois, la moyenne mensuelle de la rémunération de l’ensemble des mois précédant le licenciement ;
2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n’est prise en compte que dans la limite d’un montant calculé à due proportion.
Il résulte de la combinaison de ces textes que lorsque le salarié en raison de son état de santé travaille selon un temps partiel thérapeutique lorsqu’il est licencié, le salaire de référence à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité compensatrice de préavis ainsi que de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est le salaire perçu par le salarié antérieurement au temps partiel thérapeutique et à l’arrêt de travail pour maladie l’ayant, le cas échéant, précédé et que l’assiette de calcul de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié, celle des douze ou des trois derniers mois précédant le temps partiel thérapeutique et l’arrêt de travail pour maladie l’ayant, le cas échéant, précédé.
Pour fixer le salaire de référence à 7 171,53 euros brut mensuel par référence à la moyenne des trois ou douze derniers mois ayant précédé l’arrêt de travail de la salariée, au regard des fiches de paie de celle-ci pour la période de septembre 2018 à août 2019, l’arrêt retient que la salariée, engagée à compter du 6 novembre 2008, a exercé ses fonctions dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique à compter du 4 avril 2014 et les exerçait toujours dans ce cadre avant la suspension de son contrat de travail pour maladie en septembre 2019.
En statuant ainsi, la Cour d’appel de Versailles a violé les textes susvisés.
IV. Analyse.
Cet arrêt du 12 juin 2024 s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence de la Cour de cassation et sa solution restait prévisible.
En effet, les magistrats de la Haute cour ont déjà eu l’occasion de juger que la période de l’arrêt maladie simple doit être neutralisée pour le calcul de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement (Cass. soc., 23 mai 2017, n°15-22.223).
L’arrêt du 12 juin 2024 étend, de ce fait, la solution déjà adoptée par la chambre sociale en cas d’arrêt maladie à la situation plus spécifique du mi-temps thérapeutique.
Par ailleurs, la Cour de cassation avait déjà retenu que les périodes de temps partiel thérapeutique devaient être neutralisés pour le calcul des droits du salarié au titre de la participation, sous peine de caractériser une discrimination à raison de l’état de santé (Cass. soc., 20 sept. 2023, n°22-12.293).
Ainsi, on comprend la logique de la Cour qui prend en compte le principe d’interdiction des discriminations liées à l’état de santé, puisque le mi-temps thérapeutique diffère du temps partiel classique, en ce que le premier découle d’une décision médicale fondée sur l’état de santé du salarié, et que les salariés faisant l’objet d’une telle mesure perçoivent une rémunération diminuée au prorata de la durée de travail établie selon les préconisations médicales.
Dès lors, les indemnités de rupture étant déterminées en principe en fonction d’un salaire mensuel de référence calculé sur une période antérieure à la rupture du contrat de travail, lorsque le salarié est en arrêt de travail sur tout ou partie de la période de référence, cela peut conduire à retenir un salaire de référence moindre et donc à créer une situation discriminante de fait.
Cet arrêt doit être approuvé.