Durant la pandémie du coronavirus, de nombreux services ont exceptionnellement ouvert gratuitement leurs portes à leurs utilisateurs. Nous pouvons par exemple évoquer le cas de la Fnac qui a mis gratuitement à disposition 500 livres électroniques ou Orange qui a permis un accès gratuit aux chaines familiales comme Canal J ou Boomerang.
La chaine Canal+ n’est pas en reste puisque cette dernière a décidé de décrypter ses chaines du 16 mars au 31 mars.
Si l’opération a certainement réjoui les téléspectateurs confinés en quête de divertissement, les chaines concurrentes comme celles du groupe TF1 reprochent à Canal+ de lui avoir causé un lourd préjudice du fait du non-respect de la chronologie des médias.
La chronologie des médias régule les différentes étapes d’exploitation d’un film après sa sortie en salle. Après la période en salles, le film passe d’un support à l’autre (DVD, SVOD, chaines de télévision … ) selon diverses modalités. Les chaines payantes comme Canal+ peuvent en règle générale proposer les longs métrages actuellement 6 mois après leurs sorties dans les salles obscures. Pour les chaines gratuites comme TF1, ce délai est plus long, puisqu’il est de 22 mois.
Canal+, en décryptant ses chaines, aurait dû se soumettre au même statut en matière de chronologie des médias que les chaines gratuites. En l’espèce, lors du confinement, la chaine a diffusé des films comme Avengers : Endgame, All inclusive ou Jusqu’ici tout va bien. Canal+ serait donc sorti de sa fenêtre d’exploitation et aurait directement lésé les futurs droits d’exploitation des véritables chaines gratuites.
L’ARCOM (ex-CSA) n’avait pas sanctionné Canal+ du fait de la situation exceptionnelle engendrée par le confinement malgré les nombreuses plaintes de ses concurrents. C’est pour cette raison que le groupe TF1 a assigné Canal+ devant le tribunal judiciaire de Paris le 22 avril 2021 pour contrefaçon et concurrence déloyale.
Le tribunal judiciaire de Paris dans une décision rendue le 25 janvier 2024 condamne Canal+ à indemniser le groupe TF1 à hauteur de 1,6 million d’euros. Bien que le tribunal judiciaire n’ait pas jugé recevable l’action en contrefaçon, la concurrence déloyale a bien été retenue. En effet, il estime que
« la mise à disposition illicite en clair du programme des six chaines du groupe Canal+ a détourné les téléspectateurs des programmes des chaines du groupe TF1 et impacté leur chiffre d’affaires publicitaire ».
Si l’entièreté de la somme en réparation du préjudice demandé par le groupe TF1, à savoir 12 millions d’euros, n’a pas été octroyée, le groupe Canal+ a tout de même fait part de sa volonté à faire appel.
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Félicitations pour cet article très clair et bien résumé !