La Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) s’est substituée à la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS), et cela par la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement [1].
Si ses missions portent sur le contrôle des techniques de renseignement en vue d’une autorisation (écoutes téléphoniques, interception des données de connexion et/ou captation des données informatiques, pose de micros et de caméras), la loi du 13 juillet 2018 de programmation militaire [2] donne de nouvelles prérogatives à cette autorité administrative indépendante.
Outre la surveillance des communications électroniques internationales (voir article ici), dont le projet de loi avait reçu un avis favorable du Conseil d’État parce que le projet de loi comportait suffisamment de garanties (voir ici), la loi de programmation militaire a aussi permis à la CNCTR d’avoir des prérogatives élargies concernant le ministère des Armées.
Un service du ministère des Armées est chargé de qualifier les appareils techniques pour mettre en œuvre des mesures d’interception des communications par voie hertzienne.
Ces appareils ne sont d’ailleurs autorisés ici que pour les missions des unités et services du ministère des Armées, on peut penser au Commandement des opérations spéciales (COS), à la Direction du renseignement militaire (DRM), ou encore à la Direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DGSE), car il est possible que la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) ait son fonctionnement propre en la matière.
Désormais, l’article L. 2371-2 du code de la défense a été modifié en ce que le service du ministère des Armées doit d’abord faire une déclaration préalable auprès de la CNCTR. Si la déclaration préalable est obligatoire, c’est en raison de la loi de programmation militaire qui a modifié cette disposition du code de la défense, et élargir les mesures de renseignement possibles.
Sont désormais concernées les interceptions de sécurité [3], les interceptions de communication par voie hertzienne « n’impliquant pas l’intervention d’un opérateur de communications électroniques, lorsque ce réseau est conçu pour une utilisation privative par une personne ou un groupe fermé d’utilisateurs » [4], les mesures de surveillance des communications électroniques internationales [5], et enfin, des mesures d’interception des communications par voie hertzienne « n’impliquant pas l’intervention d’un opérateur de communications électroniques lorsque cette interception et cette exploitation n’entrent dans le champ d’application d’aucune des techniques de renseignement prévues aux chapitres Ier à IV du présent titre » [6].
Outre les déclarations préalables, la Commission doit aussi être informée des essais relatifs à ces techniques, un registre devant être mis en place pour noter toutes les techniques réalisées.
La Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement dispose donc de plus en plus de prérogatives. Seul accroc, comme le note le Professeur Jean-Christophe Videlin, la CNCTR aurait pu bénéficier encore plus de prérogatives, car l’erreur de la loi de programmation militaire a été de confier à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) une forme de contrôle à l’égard de l’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information (ANSSI).
Pourquoi confier une telle prérogative à cette autorité administrative indépendante alors que la CNCTR est totalement immergée dans le secret de la défense nationale ?
A cet effet, et pour parachever cet élargissement des prérogatives au profit de la CNCTR, « il aurait peut-être été plus opportun de désigner la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CSI, art. L. 831-1 et s.), en élargissant ses compétences et avec le mérite de créer une cohérence fonctionnelle. » [7].