Cet arrêt offre un parfait exemple de la nécessaire conciliation entre le droit du respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve.
Dans cette affaire, un système de vidéosurveillance permettant d’assurer la protection et la sécurité des biens et des personnes au sein des locaux d’une entreprise, à savoir une pharmacie, avait été mis en place.
Constatant qu’un salarié avait notamment facturé des produits à un prix inférieur au prix de vente, ce dernier était licencié pour faute grave sur la base des enregistrements de la vidéosurveillance.
La Cour d’appel considérait ces enregistrements licites, précisant que le système mis en place et destiné à la protection et la sécurité des biens et des personnes dans les locaux de la société avaient bien fait l’objet d’une information préalable des salariés et d’une consultation des représentants du personnel.
La Chambre sociale casse et annule l’arrêt rendu par la Cour d’appel.
Tout d’abord, la Cour de cassation rappelle les obligations attachées à la mise en place d’un système de vidéosurveillance.
Elle constate que le dispositif de vidéosurveillance mis en place permettait également de contrôler et de surveiller l’activités des salariés de la société, et avait d’ailleurs été utilisé à cette fin, sans que cet objectif ait fait l’objet d’une information et d’une consultation préalable des représentants du personnel.
Les enregistrements étaient donc considérés comme un moyen de preuve illicite.
La Cour de cassation ajoute que néanmoins, l’illicéité d’un moyen de preuve, au regard des dispositions susvisées, n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant apprécier si l’utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.
Cette solution s’inscrit dans la droite lignée de l’évolution jurisprudentielle en matière de preuve (Cass. Soc., 30 septembre 2020, n° 19-12.058 ; Cass. Soc., 25 novembre 2020, n° 17-19.523.), par laquelle la Haute juridiction avait déjà reconnu la recevabilité d’une preuve obtenue obtenue de façon illicite.